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Omega : Les J.O. côté chrono

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Omega : Les J.O. côté chrono
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Depuis Bienne, berceau de la manufacture Omega, il faut emprunter une petite route qui serpente à travers les collines verdoyantes, franchir des tunnels percés dans la roche pour déboucher dans la vallée où se pressent les maisons du village de Corgémont, 1 844 habitants, centre névralgique des Jeux Olympiques depuis 1932. À mille lieues de l'ambiance survoltée des stades, Swiss Timing - filiale du Swatch Group qui opère sous la marque Omega pour les J.O., Tissot pour le Tour de France et le basket ou encore Longines pour les sports équestres et le ski - se prépare tranquillement pour les Jeux.

Avec plus de 500 événements par an dans le monde entier et des solutions pour plus de cent disciplines, Swiss Timing n'a pas d'équivalent dans sa spécialité. Omega est bien plus qu'un logo sur une affiche. À Paris, la marque va déployer 550 personnes et plus de 350 tonnes de matériel pour sacrer les héros des Jeux Olympiques et Paralympiques. Pour Raynald Aeschlimann, CEO d'Omega, la mission est sacrée : il s'agit de transformer des données en émotion, pour l'amour du sport, par respect pour les athlètes qui s'entraînent dans l'ombre pour gagner leur place sous les projecteurs, une fois tous les quatre ans. « Cela va bien au-delà de la mesure du temps pour déterminer qui a gagné. Sur les 1,3 million de données que l'on va mesurer pendant ces deux semaines, la moitié est uniquement au service des sportifs, de leur entraîneur et de tous les gens qui sont dans les stades et derrière leur écran. Nous ne sommes pas des radars. La mesure est là pour sublimer le sport. » Il est bien loin ce jour de 1932 où un horloger d'Omega a été dépêché à Los Angeles à la demande du CIO avec une valise contenant 30 chronographes. Jusque-là, les juges se débrouillaient avec leurs chronographes personnels, tous différents et pas toujours précis. Réputés fiables, les chronographes Omega présentaient également l'avantage d'être tous certifiés par un même organisme. Les choses sérieuses pouvaient commencer.

« Ce temps ne sert ni au sportif ni à son coach. Mais ça change tout pour ceux qui regardent la télévision. »

La célèbre photo-finish (qui offre une photo du temps) en 1948 marque l'entrée dans l'ère moderne. En 1964, Omega introduit l'Omegascope, qui permet d'afficher les temps chronométrés à l'écran lors des premiers jeux télévisés. « Ça a révolutionné le sport, se souvient Raynald Aeschlimann.

Ce temps ne sert ni au sportif ni à son coach. Mais ça change tout pour ceux qui regardent la télévision. » Entre 1940 et 1960, la mutation va s'opérer entre le chronométrage manuel et l'électronique. En 1960, une controverse à l'issue de la finale du 100 m nage libre débouche sur la mise au point d'un système révolutionnaire (effectif en 1968 à Mexico), qui permet à l'athlète d'arrêter lui-même son chrono au moyen d'une plaque sensible dans le bassin. Transposé cette année à l'escalade, ce système ne laisse aucune place à la contestation et les athlètes adaptent leur stratégie de grimpe, avec des effets spectaculaires.

Développé en partenariat avec la fédération de natation, ce système illustre le lien de confiance qui s'est tissé entre le chronométreur et les athlètes. Alain Zobrist, CEO de Swiss Timing, est à la tête d'une équipe de 400 personnes, développeurs, logisticiens, ingénieurs… « Pour chaque sport il y a des technologies différentes, des règles différentes, des outils de chronométrage ou de mesure de performances différents… » La collaboration avec les athlètes et les coachs est indispensable et les innovations sont validées par les fédérations internationales. « On se dit chronométreur mais on fait bien plus que ça. On chronomètre un départ, une arrivée, des distances, des hauteurs, des longueurs, mais on traite aussi toutes ces données en temps réel pour les afficher à la télévision. On invente et on produit nous-mêmes nos appareils de chronométrage et on gère la chaîne de production. » L'athlétisme, la plus complexe des disciplines, mobilise à elle seule 50 personnes pendant les J.O. Pour illustrer le propos, une piste reconstituée décompose le dispositif pour les visiteurs. Depuis le coup de pistolet électronique jusqu'à l'affichage et la transmission des résultats aux diffuseurs, la mécanique est bien rodée. Les starting-blocks sont équipés d'un système de détection de faux départ avec capteur de pression (2 000 mesures par seconde), le temps tournant, les temps intermédiaires, la vitesse du vent sont sous contrôle.

« On invente et on produit nous-mêmes nos appareils de chronométrage et on gère la chaîne de production. »

Sur la ligne d'arrivée, une cellule photoélectrique stoppe le chrono et trois caméras photo-finish permettent au juge de sacrer le vainqueur. En 2018, les capteurs de mouvement et de positionnement ouvrent la porte à une ère nouvelle, celle de la data et de l'Intelligence Artificielle. Le but ? Donner du sens à la gigantesque masse de données collectées par les capteurs biométriques et les puces intégrées aux dossards. C'est un vrai changement de paradigme : outre l'affichage de données - la longueur de brasse d'un nageur, le nombre de pas d'un coureur, la rotation et l'angle du corps d'un plongeur, le temps de réaction après le service d'un joueur de tennis… - , on peut croiser ces informations avec l'historique des performances de l'athlète, comparer les compétiteurs, faire des statistiques. De quoi pimenter l'épreuve et captiver le téléspectateur. Traitées en temps réel et présentées sous forme de graphique (8K) en 7 polices de langues différentes en 1/10e de seconde, ces données sont pain bénit pour les commentateurs. Après coup, elles permettent aux sportifs et à leur coach d'analyser chaque geste pour comprendre à quel moment et comment la compétition a été gagnée. Ou perdue. À Paris, la caméra photo-finish sera encore plus précise avec 40 000 images par seconde (contre 10 000 “seulement” il y a quatre ans à Tokyo). Des chiffres qui donnent le vertige même si, pour Alain Zobrist, la précision (qui peut aller jusqu'au millionième de seconde aujourd'hui), la miniaturisation des capteurs et une compréhension toujours meilleure des performances restent des axes d'amélioration.

Quid des Jeux Paralympiques ? « Les athlètes relèvent de différentes classes selon leur handicap. Il est possible que des athlètes avec des handicaps différents, qui appartiennent à des classes différentes, concourent dans une même épreuve, par exemple en natation. Donc il peut y avoir deux médailles d'or dans la même course : on chronomètre plusieurs courses en parallèle » explique Alain Zobrist. En régie, les chronométreurs et les juges n'ont que quelques instants pour trancher quand les coureurs franchissent la ligne d'arrivée au coude à coude.

« Quand on valide, il n'y a pas de retour en arrière ! » conclut-il. On ne regardera plus les J.O. de la même façon.

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