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Melie Klein : Déesse sur ordonnance

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© Götz Göppert
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Il y a des femmes qui rêvent de parures et de rivières de diamants. D'escarpins vernis à semelles rouges ou de sacs à cadenas. D'autres, qui s'observent méticuleusement chaque jour dans la glace, en pensant aux heures délicieuses qu'elles s'offriront en institut. Masques liftants, thalasso et massages compris. Mélie Klein elle, n'a jamais rêvé d'autre chose que d'automobile. De six cylindres en ligne double arbre, d'overdrives et de duels de champions. Au point que lorsque ses amies lui parlent de spa, c'est plutôt au circuit belge de Francorchamps que Mélie pense. Au toboggan des Ardennes. « Ressusciter les voitures me procure un plaisir immense, autant que d'avoir pu aider un vivant. » Au raidillon de l'eau rouge. Et au freinage de la source. Elle est comme ça, Mélie. Elle a toujours tout fait à contresens. Et si possible, en surprenant son monde. « Toute jeune, je fabriquais des voitures avec tous les matériaux qui me tombaient sous la main, des morceaux de bois, des tuyaux, des cagettes, elles ne ressemblaient pas à grand-chose mes autos, mais les courses Senna-Prost étaient épiques et passionnantes », confie-t-elle. Élevée à la campagne, entres animaux et tracteurs, elle passe le plus clair de son temps dehors sur les tas de sable du jardin, à rêver devant la maison que ses parents restaurent dans les Yvelines.

Elle traîne aussi beaucoup du côté de l'atelier de son père. « J'étais sidérée par les outils, la douceur des mécanismes des cliquets Facom, la force du levier des grandes clefs à œil, la dextérité de mon père aussi, Il a toujours tout su faire avec ses mains. » Et puis, un jour, elle découvre l'histoire de son arrière-grand-père. Un soldat, rentré de la guerre en 1945, qui se lança avec succès dans la réparation automobile. « Je me souviens encore du jour où j'ai trouvé sa photo. Il posait fièrement devant sa Renault NN Torpedo cabriolet 6 cylindres de 1926 avec son épouse Emilie et ses mécanos, le panneau indiquait derrière lui Fernand Destenay, Mécanique générale à Romilly-sur-Seine. » L'enseigne clignote immédiatement dans la tête de Mélie. Elle n'aura désormais plus qu'un rêve secret, monter un garage. Elle garde aussi un objectif plus accessible, décrocher son Baccalauréat puis s'offrir la reine de la route. Cette voiture mythique qui l'a tant fait rêver quand elle avait traversé l'Europe avec ses parents pour se rendre sur le tournage du film que son père participa en Yougoslavie en 1982, Les cavaliers de l'orage . En enchaînant les petits boulots sur les plateaux télé, elle parvient à s'offrir une DS 20. « Je ne l'avais pas payée bien cher à l'époque, c'est peut-être la raison pour laquelle elle est vite tombée en panne. Je n'ai jamais eu les moyens de retaper les suspensions. » Le cœur gros, elle est contrainte de la brader.

Mais il en faut plus pour sortir Mélie du droit chemin. C'est donc en Volvo 480 qu'elle rentre à la Sorbonne pour étudier l'histoire de l'art. « Le break de chasse P 1800 était trop cher. » Et puis, pour brouiller aussi un peu les pistes, elle se met au chinois. .. Mais pas pour comprendre le système hydraulique Citroën. Son premier flirt lui avait fait connaître les vibrations du flat-twin BMW, les carburateurs Bing et les “rides” échevelés en R 80. Son grand amour lui fera découvrir les Jaguar. « Il avait 25 ans, il était beau et il roulait en XJS. Les premiers coupés 5.3 l - V12 boîte auto, avec parechocs plastiques et jantes Rostyle, pas les HE qui suivirent avec la culasse Fireball. On passait notre existence à mettre de l' essence. » Mais le ver est rentré définitivement dans le fruit. Amoureuse et passionnée, Mélie laisse tomber l'histoire de l'art. Au contact de son homme, elle découvre aussi qu'on peut entretenir son auto soi-même et elle se lance alors dans la mécanique. Etudiante le jour, mécano la nuit, amoureuse le reste du temps, elle décide de faire en plus un enfant ! Elle commence donc par le plus simple, les biberons, et enchaîne avec les vidanges en parking et puis les plaquettes au cric sur le trottoir. Et surtout, elle se lance un défi de taille : devenir médecin. « Retaper les autos, rassurer les âmes, réparer le corps humain, tout ça c' est finalement assez voisin », convient-elle dans un humble sourire. Il en faut de la volonté pour réussir ses difficiles études et élever son fils dans le même temps. Au moins autant que pour entamer une restauration au long cours. « Retaper les autos, rassurer les âmes, réparer le corps humain, tout ça c'est finalement assez voisin. »

Melie Klein Photos
© Götz Göppert

Sept ans plus tard, Mélie a décroché son diplôme. Elle est Docteur diplômé en médecine générale. Et comme elle a de la suite dans les idées, elle a aussi trouvé le temps de restaurer une nouvelle DS 20 histoire d'oublier sa première expérience ratée sur coussin d'air. « Je l'ai achetée presque en pièces détachées, non roulante. On est allé la chercher sur un plateau, c'est une 1969, boîte hydraulique. Je l'ai restaurée le week-end et pendant les vacances, sous la direction de Jean Gallabrun, un spécialiste Citroën en Auvergne, mon autre région de cœur. » Avec la star du LHM clermontois, elle a sorti le moteur, désaccouplé la boîte, acheté chemises et pistons, envoyé l'arbre à came et le vilebrequin « à la rectif », acheté la pompe hydro HP en échange standard, les sphères et même chiné le drap rouge des sièges, celui du pavillon et de la plage arrière. C'est Olivier Fouquet, un garagiste de Hanches, en Eure-et-Loir, qui l'a aidée pour la peinture (bleu d'orient AC616 qu'elle a souhaité légèrement assombrir) et la sellerie. Elle s'est même offert quatre Michelin XAS neufs 185HR15, la Rolls des chaussettes et surtout la monte d'origine de l'époque en asymétrique. Quatre bijoux à 900 euros montage et équilibrage compris. « L 'histoire d'une voiture, c'est comme l'histoire d'un patient. Une première main n'a pas le même caractère qu'une troisième et pourtant toutes les deux sont uniques et singulières. Ressusciter les voitures me procure un plaisir immense, autant que d'avoir pu aider un vivant », dit-elle presque émue. Et n'allez pas dire à Mélie que le bleu de travail ne sied pas à son genre de beauté. Ou pire, que ses passions ne sont pas très féminines. Quand on est jolie comme elle, Docteur en médecine lauréate de la faculté de Créteil, maman d'un joli fils et collectionneuse de young timer, on n'est pas un garçon manqué, on est plutôt une fille très réussie.

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