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Vacheron Constantin X Woodkid : danses horlogères

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Vacheron Constantin X Woodkid : danses horlogères
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En 2022, Woodkid a accompagné deux jeunes artistes dans le cadre du programme de mentorat “One of Not Many” initié par Vacheron Constantin en collaboration avec les Studios Abbey Road. Cette année, un projet inédit réunit la manufacture de haute horlogerie suisse et l'artiste français, avec une création originale qui associe deux dimensions antagonistes et complémentaires du monde moderne : l'analogique et le digital, pour faire naître une nouvelle émotion. Nous sommes dans le Xe arrondissement de Paris, au premier étage d'un quartier populaire où Woodkid a installé son studio d'enregistrement et de post-production. Il nous y accueille pour évoquer cette collaboration qui suscite la curiosité dès le premier abord… pour ne pas dire une certaine perplexité. La “pièce” (c'est ainsi que l'artiste désigne sa création) intitulée “Geometric pulse” a été composée suivant le principe des rythmes euclidiens. Passionné par la musique expérimentale, Woodkid s'est servi d'un article publié en 2005 par le canadien Godfried Toussaint, dans lequel on apprend que tous les rythmes musicaux (ou presque) obéissent à une même règle mathématique. Les mathématiques, la musique et la danse entretiennent une complicité secrète que nous ne soupçonnions pas.

De là à dire que l'horlogerie pourrait nous faire danser, il n'y a qu'un pas. « J'aime cette idée qu'il y ait un principe accessible au cœur de ce qui semble complexe » martèle Woodkid. C'est ce lien entre complexité et simplicité qu'il explore. « Les équipes de Vacheron Constantin m'ont demandé de revenir à quelque chose d'essentiel » explique l'artiste. Chaque année, la maison détermine une thématique qui donnera le ton de ses collections. En 2023, “L'essential” invite à se dépouiller du superflu pour revenir aux valeurs élémentaires, à la pureté du design alliée à l'excellence des savoir-faire. Tout a commencé par ce qu'il y a de plus symbolique dans la mécanique horlogère, ce fameux tic-tac (on entend parfois “tic-tic” à bien y réfléchir) du balancier d'une montre. « Ils m'ont soumis une série d'enregistrements de mécanismes » se souvient le musicien qui les écoute séparément avant de les superposer. De subtiles variantes entre leurs voix créent un chœur. Il y trouve des polyrythmies, l'amorce d'une danse, et déroule son idée. « Je me suis dit qu'une des bases de la musique traditionnelle, la nature primitive des rythmes, était la danse. » L'idée apparaît, évidente. « Je me suis rappelé le principe des rythmes euclidiens, qui est fascinant. » “Fascinant”, le terme n'est pas trop fort. Ajoutons “mystérieux” et laissons-nous étonner.

« J'aime cette idée qu'il y ait un principe accessible au cœur de ce qui semble complexe. »

Imaginez qu'une simple loi mathématique que personne ne soupçonnait fait danser le monde depuis la nuit des temps… « Salsa, samba, tresillo, bembé, musiques cubaines et africaines, certaines musiques asiatiques… , énumère Woodkid, la plupart des rythmes dansants sont régis par ces lois mathématiques très simples. » Des lois simples qui se matérialisent de façon tout aussi simple. Tracez un cercle, choisissez un nombre de notes et placez-les sur le pourtour du cercle en les espaçant autant que possible. Reliez-les par un trait, vous obtenez la photo de votre rythme. « C' est assez simple » conclut-il. Et dire que nous avons failli trouver cela compliqué… « Dans la pop music on a l'habitude de compter la musique en 4, en 8, très rarement en 3 temps. » Si l'on change le référentiel (la “taille” du cercle et le nombre de notes), cela se corse. « C'est compliqué de frapper le bembé dans ses mains et pourtant on a envie de danser. » C'est ce rythme qu'il choisit et il dispose sept notes sur un cercle de douze pulsations par analogie au tour d'heures du cadran d'une montre. « On pourrait jouer les douze, c'est une question de rythme. Dans tout rythme se cache la danse, même s'il s'agit d'un rythme linéaire comme le tic-tac d'une horloge. Si j'en accentue certains, j'introduis des contretemps et c'est là que la danse apparaît. » Woodkid marque le tempo d'une main et fredonne pour illustrer son propos avant d'éclater de rire. « Ce que je fais là ne va pas être facile à transcrire à l'écrit ! » Heureusement, le rythme est plus facile à dessiner. Les pulsations réparties sur le cercle sont reliées entre elles. « Cela crée une sorte de polygone qui ressemble à un diamant. C'est le bembé, que l'on retrouve partout en Afrique. » Le son prend forme. « Tout ne tourne pas à la même vitesse dans une montre » observe Woodkid.

Pour enrichir la pièce et sa représentation, il y ajoute le tresillo et une touche de samba, mélangeant rythmes africains et sud-américains. « Avec le tresillo je tourne en 8 temps et j'en joue 3 sur les 8. C'est une superposition étonnante. » Le marimba virtuose percute les notes roulées par les vagues de la clarinette. « Les rythmes deviennent compatibles grâce à leur origine mathématique. Le décalage donne l'impression de complexité. C'est abyssal. » Partant du son d'une montre, Woodkid aboutit à une œuvre musicale et à sa représentation. Par le truchement des mathématiques, il abolit les frontières entre les disciplines, entre analogique et digital. Comme s'il pouvait à sa guise passer de chaque côté du miroir. « Pour moi ce ne sont pas deux univers distincts » : pour Woodkid, c'est une vision du monde, une forme de spiritualité. La boucle est bouclée. Tout est net, précis. En un mot : parfait, ce qui n'exclut pas l'émotion. « J'ai toujours eu envie de perfection dans mon travail » explique l'artiste qui s'est trouvé en terrain familier à la manufacture Vacheron Constantin. « C'est vertigineux. L'artisanat repose sur l'extrême précision, la rigueur, la répétition, l'infime détail. C'est ce qui crée l' émotion , poursuit-il, faisant le parallèle avec la danse. On ne reprochera jamais à une montre d'être trop précise. J'aime que ce soit constitutif de sa fabrication ».

« On ne reprochera jamais à une montre d'être trop précise. J'aime que ce soit constitutif de sa fabrication. »

Initié en 2022, le partenariat entre Woodkid et Vacheron Constantin a débuté avec un programme de mentorat artistique intitulé “One of Not Many”, avec les studios d'enregistrement londoniens Abbey Road. Chanteur, Yoann Lemoine, alias Woodkid, s'est imposé comme une figure incontournable de la musique électro. Ses deux albums, The Golden Age (2013) et S16 (2020), ont connu un succès international. Producteur et vidéaste, il a collaboré avec Katy Perry, Lana del Rey, Taylor Swift, Harry Styles ou Moby, signé et produit sept titres sur le dernier album de Mylène Farmer. Autour du thème “L'essential”, fil rouge de la manufacture pour 2023, Woodkid a composé une pièce musicale inédite qui revient aux sources du rythme, en s'appuyant sur les pulsations du mouvement d'une montre.

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