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Marc Pajot : le broker de Saint-Tropez

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Marc Pajot : le broker de Saint-Tropez
© Marc de Delley & DR
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Marc Pajot nous reçoit tout sourire depuis son joli bureau juste au-dessus du sympathique port de Saint-Tropez. À distance, il ne résiste pas à l'envie de nous faire visiter le lieu avec son téléphone à bout de bras. En ouvrant la porte-fenêtre qui donne sur la terrasse, il s'excuserait presque de la présence trop importante des motor-yachts. On peut comprendre que ce vainqueur de la Route du Rhum 1982, dont le ton de voix chuintant rappelle celui du président Giscard d'Estaing, regrette de ne pas voir un seul mât depuis son bureau. Ce paysage aurait sûrement été différent s'il était resté dans sa Baule natale, mais après sa dernière Coupe de l'America en 2000, Marc Pajot s'est lancé dans une activité de “brokerage”. Pourquoi à Saint-Tropez ? Car la clientèle qui recherche les services d'un courtier pour l'achat et la vente de bateaux de grande plaisance (c'est-à-dire de yachts) se trouve dans le sud. « Au début, je pensais travailler pour une grosse agence comme Camper & Nicholsons, mais j'ai toujours été mon propre patron, alors il valait mieux que je monte ma propre boutique Pajot Yacht Sélection. »

« J'ai toujours été mon propre patron. Alors il valait mieux que je monte ma propre boutique. »

Dans le nom de sa petite agence de trois personnes, Marc Pajot insiste beaucoup sur le mot “sélection” : « Car les clients qui viennent chez nous recherchent un service personnalisé. » Il cite l'exemple d'un Américano-Libanais qui voulait un bateau à voile performant à barrer lui-même. « Je l'ai orienté d'abord vers un Wally 80 pieds, et au bout de quelques années je lui ai conseillé un Wally Tango 10 0 pieds qu'il a fait construire en Italie », raconte le broker. Il nous montre, via son téléphone, les sublimes photos de ces deux bateaux fendant l'écume accrochées au mur derrière lui, avant de nous révéler son secret : « Ce type de service pour de riches clients s'inscrit dans la continuité du travail de conception de bateaux de la Coupe de l'America comme j'ai pu le faire avec French Kiss en 1987. ».

En effet, il faut trouver le bon architecte, le bon chantier et le bon équipage, sans oublier de donner les précieux tuyaux au propriétaire une fois sur l'eau. « Ce propriétaire passionné me laissait tout gérer, j'avais carte blanche, c' était fantastique. Un jour il m'a dit en rigolant : “Marc, je ne sais pas pourquoi je te paye, tu prends plus de plaisir que moi à naviguer sur mon bateau”. » La réputation et le palmarès de Marc aidant, la clientèle de Pajot Yacht Sélection apprécie avant tout ses conseils.

L'Eco Yacht est presque autonome en énergie, grâce à ses voiles, ses panneaux solaires et la puissance réduite de ses propulseurs

De ce métier de courtier hors pair découle naturellement celui de constructeur avec le projet “Eco Yacht”, parti d'une simple réflexion autour des bateaux de 100 pieds avec son ami architecte Nicolas Fauroux, et sans avoir de client au départ. L'idée était d'imaginer le meilleur catamaran du monde : ainsi est né le modèle 115' (35 m) décliné en 145' (44 m), puis en 90' (27,50 m). Pourquoi un yacht catamaran ? « Pour sa stabilité, qui n'oblige pas à compenser le roulis avec un stabilisateur comme sur les yachts à moteur, ce qui nécessite un générateur polluant allumé en permanence. » L'Eco Yacht, lui, est quasiment autonome en énergie, grâce à la puissance des générateurs et des propulseurs réduite au minimum. « Les clients s' en inquiètent, mais je leur explique qu'il y a une voile, des panneaux solaires et qu'il faut utiliser la ventilation naturelle du carré, plutôt que la clim. Il suffit de laisser les portes ouvertes et laisser circuler l'air », affirme Marc Pajot, auteur de Catamarans - Un art de vivre (2013).

Actuellement, la construction d'un Eco Yacht 90' et celle d'un 115' en sont au stade de « la discussion très avancée », et n'existent qu'en images 3D en attendant de sortir du chantier italien Wider d'ici deux ans. Au premier coup d'œil sur les clichés que l'on peut admirer sur le web, ces élégants yachts surprennent par l'absence de bôme. « La tendance a été à la multiplication des hauteurs de ponts ces dernières années et donc la bôme se retrouvait très haut placée, la voile devenait un peu dangereuse à utiliser et n'offrait pas un bon rendement. Résultat, l' équipage ne s'en servait plus. Nous avons donc fait le choix inverse sur l'Eco Yacht, nous avons limité la cabine à un seul pont et nous avons reculé le mât. La voile est assez étroite, sans bôme et s'affale très facilement sur le flybridge en limitant le fardage. On veut que ce soit simple et performant. » Évidemment la performance et la compétition restent toujours bien présentes chez Marc Pajot qui gère la promotion de la formule monotype Cape 31, un bateau élégant et sportif de 9,5 m conçu par Marc Mills (l'architecte du Wally Tango). Avec enthousiasme, le fringant broker nous montre aussitôt une photo : « Les Anglais ont un championnat avec 20 ou 25 bateaux. Nous en France nous aurons une dizaine de bateaux aux Voiles de Saint-Tropez (du 29 septembre au 8 octobre). Pour l'instant on court en IRC, mais dès l'an prochain, il y aura un circuit en monotypie que je suis en train de mettre en place. Je vends les bateaux, j'organise le championnat et donc je m'amuse énormément. ».

D'ici là, Marc Pajot fêtera ses 70 ans le 21 septembre, et ira saluer le départ de Marie Tabarly à bord de Pen Duick VI. La fille d'Éric Tabarly s'élance autour du monde en équipage, tout comme Pajot l'avait fait sur le même bateau en tant que coéquipier pour la Whitbread, l'ancêtre de la Volvo Race. « Je trouve ça bien de retracer ce que faisaient les anciens. Il faut s'imaginer que quand on est partis de Cape Town en 1973, nos seules lectures c' était Moitessier et Le Toumelin. C' était une course entre aventure et compétition. » C'était il y a cinquante ans déjà, et à une époque où on ne faisait pas d'interview en vidéo sur son smartphone.

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