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Massimo et sa Mercedes 300 SL : étoile parisienne

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Massimo et sa Mercedes 300 SL : étoile parisienne
© Kevin Van Campenhout
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Il faut dire qu'il a été à bonne école, son père étant un amateur de longue date d'automobiles décalées : « J'ai grandi à l'arrière de véhicules très rares en Italie, une Jaguar XJS V12 Targa, un des premiers Range Rover trois portes… Mon père n'était pas un collectionneur comme on l'entend aujourd'hui, plutôt un amateur éclairé. Il a ensuite acquis des autos plus sportives comme des Aston Martin pour nous faire plaisir à mon frère et à moi.

« Je ne suis ni un puriste, ni un collectionneur, j'aime utiliser mes voitures. »

L'élégance et une certaine discrétion restaient ses critères premiers car il les utilisait quotidiennement. » Dès l'âge de treize ans, Massimo est autorisé à essayer les automobiles familiales aux côtés de son père à la campagne et, à l'âge de 18 ans, il s'essaye à la liberté automobile au volant de la VW Polo de sa mère. Très vite, premiers diplômes en poche, ses parents lui offrent une BMW Z3 -« la voiture de James Bond qui me faisait tellement rêver » - mais un retour du Var sur routes verglacées verra le rêve brisé par une méchante sortie de route. Massimo n'a rien, l'auto est en revanche bonne pour une retraite prématurée. Sa première automobile sportive fut une BMW M3 E46 à boîte manuelle qu'il garda deux ans avant d'acheter sa première Porsche 911, une GT3, marque qu'il ne quitta plus jamais : « Des GT3, j'en ai eu tellement que je ne les compte plus. Ma passion pour Porsche m'a aussi poussé à acquérir une Porsche 356 qui fut ma première voiture ancienne. »

Car Massimo a des goûts éclectiques : « Tout ce qui va de 1920 à nos jours en gros. Je pourrais tout autant rouler en Bugatti 35 Grand Prix, probablement une réplique Pur Sang vu leur cote, qu'en voiture moderne. Je n'ai pas de chapelle, je suis avant tout guidé par les émotions que suscite une voiture, qu'elles soient esthétiques ou sensorielles. Une voiture est là pour nous offrir un plaisir de conduite, de bons moments. Bien entendu, je suis aussi très sensible à leur histoire. » Quand bien même il roule encore en Italie avec une Ferrari 360 Challenge Stradale bleue intérieur beige récemment acquise, il nous confie : « J'ai un peu mis de côté les supercars comme les Ferrari 599 GTO ou les Porsche 911 GT2 RS que j'adore car je n'en ai plus l'utilisation. Pour les exploiter pleinement, on arrive vite à des vitesses folles à leur volant. » Pas question d'accumuler en revanche : « Comme je n'ai ni le temps, ni les moyens, ni l'espace nécessaires, je n'hésite pas à changer souvent de voitures, en général au bout de deux ans, le plus important étant d'en profiter au maximum. » Mais Massimo est assez sentimental :

« J'aime garder un lien avec le nouveau propriétaire. Il m'est déjà arrivé de racheter une de mes anciennes voitures qui me manquait, jusqu'à trois fois pour une Porsche 993 GT2, l'auto était d'ailleurs encore à mon nom ! Il m'arrive aussi de racheter des automobiles identiques, j'ai eu trois Porsche Carrera GT et deux Ferrari 599 GTO. Cette Mercedes 300SL, c'est d'ailleurs ma deuxième, la première je l'ai gardée six mois alors que j'habitais à Londres et je l'ai revendue à un ami italien qui en possédait la moitié et l'a rachetée totalement. » C'est en s'installant à Londres que Massimo pousse sa passion d'un cran : « J'ai dû posséder une trentaine de voitures en treize ans de vie là bas ! Jusqu'à huit autos en même temps, ce qui était trop. »

Des Porsche naturellement mais aussi des autos dites Restomod telles une Alfa GTA-R par Alfaholics, une véritable bombe mais manquant de mise au point, ou encore une Porsche 911 aux spécifications ST, mais aussi une des premières Porsche 911 Singer achetée en seconde main. « La 911 par Singer était la numéro 5, elle était blanche et baptisée France. J'en ai beaucoup profité à Londres et suis allé au Mans avec pendant les 24 Heures. J'ai ensuite passé un été avec la voiture aux Etats-Unis où Singer a fait un véritable “upgrade” moteur et carrosserie et, une fois revenue en Europe, elle est devenue bleue. »

Les ingénieurs ont fait des miracles pour transformer une bête de course en une GT fiable, confortable et très performante

Véritable star d'Instagram, l'auto a désormais changé de main. « Je ne suis ni un puriste ni un collectionneur, j'aime utiliser mes voitures. En vendre une n'est jamais facile mais c'est pour pouvoir en essayer une nouvelle. J'adhère également à la démarche Restomod pour certaines automobiles, notamment celles qui se sont illustrées en compétition à l'époque tant sur circuit qu'en rallye. C'est pour moi l'alliance entre deux mondes, l'esthétique d'une part et le meilleur des performances et de la fiabilité d'autre part, tant pour un usage urbain qu'à la campagne ou sur circuit. J'aime l'idée d'un sur-mesure, d'une automobile unique, très personnelle. Aujourd'hui une Jaguar E-Type “Fast Road” ou une 911 préparée par Ateliers Diva me font rêver par exemple. » En revanche, il n'est pas question de transformer la Mercedes 300 SL de 1955 : « C'est une automobile mythique. » En effet, la Mercedes 300 SL W198, tout droit issue de la voiture de course W194 qui avait tout gagné dès 1952 avec notamment un doublé au Mans, un autre à la Panamericana et une deuxième place aux Mille Miglia, fait partie des automobiles de légende. Max Hoffman, pilote accompli et importateur aux Etats-Unis de Porsche, Alfa Romeo et Mercedes, souhaite vendre une version routière de la championne de course et ira jusqu'à verser un acompte sur les 1 000 premières autos, persuadé qu'une automobile sportive et racée l'aidera à vendre le reste de la gamme.

C'est donc en toute logique que la 300 SL sera dévoilée au salon de New-York 1954. Les ingénieurs ont fait des miracles en travaillant jour et nuit pour transformer une bête de course en une automobile de grand tourisme à la fois fiable, confortable, très performante et dotée d'innovations techniques jamais vues sur une voiture de série. La 300 SL (SL pour Sport Leicht, “sport léger ”) remporte tous les suffrages avec son châssis tubulaire, son six cylindres à injection directe, un carter sec, des freins ailetés, quatre roues indépendantes et, bien entendu, sa carrosserie profilée avec ses fameuses portes “papillon”. Elles ont été installées pour épouser la structure du châssis qui monte sur les côtés, afin d'assurer le plus de rigidité possible, faisant de cette contrainte un véritable attrait esthétique demandant néanmoins une certaine souplesse pour monter à bord malgré le volant inclinable. Les performances sont exceptionnelles avec une vitesse de pointe de 230 km/h et le 0 à 100 en moins de 7,4 secondes, obtenues grâce au six cylindres incliné à 45° afin d'abaisser la ligne du capot. Automobile sportive appréciée des pilotes, tant de Juan Manuel Fangio que de Stirling Moss qui finira deuxième du Tour de France Automobile 1956 avec Georges Houel, la 300 SL devient vite la voiture du gotha : Clark Gable, Sophia Loren, Paul Newman, le Shah d'Iran, Romy Schneider, Tony Curtis, l'Aga Khan, Gunter Sachs ou encore Herbert von Karajan, tous ont roulé en Mercedes 300 SL. Paul Morand, grand amateur d'automobiles sportives, écrira ainsi dans son Journal Inutile : « D'habitude, les voitures anciennes, démodées, ne valent pas le prix de la ferraille. Une exception, la 300 SL qui vaut deux fois le prix de la mienne, modèle 1957, que j'ai revendue en 1959 . Une merveille !

Une fois, j'ai frôlé la mort, entre Genève et Lausanne, je marchais à 160, j'ai sagement donné un coup de volant pour éviter un cycliste. Après l'avoir dépassé, ayant voulu remettre l'auto dans la ligne droite, la direction s'est mise à flotter de plus en plus à mesure que j'essayais de la redresser. Je n'ai jamais compris pourquoi. Une auto m'arrivait en face ; j'ai maintenu mon volant droit et serré, fermé les yeux, attendu le choc : rien ne s'est passé, j'ai repris mon équilibre. » 1 400 exemplaires seront produits de 1954 à 1957, exportés à 80 % aux Etats-Unis. Une version roadster sera également lancée avec succès, là encore à la demande du marché américain. Vendue neuve aux Etats-Unis en 1955, la 300 SL de Massimo est née en hellblau avec intérieur en cuir bleu et tartan écossais. « J'ai d'ailleurs fait repeindre les roues Rudge de la même couleur que la carrosserie. Cette voiture est restée aux Etats-Unis jusqu'en 1990 avec seulement deux propriétaires, le second l'avait fait repeindre en rouge intérieur beige. Puis l'auto est partie en Allemagne chez le plus grand collectionneur allemand de 300 SL qui en possédait quinze ! C'était alors, semble-t-il, sa 300 SL préférée. » La voiture est ensuite vendue à un collectionneur anglais qui ne l'a jamais conduite. Il s'en sépare en 2016 auprès d'un ami de Massimo qui lance une restauration totale chez DK Engineering où elle retrouve sa teinte et son intérieur d'origine. Mais ce grand collectionneur n'utilise quasiment pas la voiture. Massimo rêve de la 300 SL bleue.

« Je suis avant tout guidé par les émotions que suscite une voiture, qu'elles soient esthétiques ou sensorielles… »

« Je voulais venir aux Journées d'Automne en octobre dernier avec une voiture ancienne, alors j'ai craqué ! Je me suis séparé de la Singer et ai dû faire quelques travaux au niveau des freins notamment car l'auto n'avait que peu roulé. » Si cette année s'annonçait riche en évènements avec la 300SL, elle sera contrariée comme pour tous les passionnés : « J'avais prévu de participer au Ice Saint-Moritz, ce jeune concours d'élégance sur le lac gelé de Saint-Moritz avec ses séances de roulage libres tout en glisse, l'auto avait d'ailleurs été équipée de pneus Pirelli cloutés mais, malheureusement une fois arrivé là-bas par la route depuis Milan, l'épreuve a été annulée. » Et d'ajouter :

« Je me suis inscrit au Tour Auto avec mon ami italien qui a notre ancienne 300 SL, chacun avec la sienne ! Mais les dates reportées sont malheureusement incompatibles avec mon agenda. Enfin, je souhaitais rouler avec l'auto entre Utah, Colorado et Californie cet été, là où l'auto a vécu sa première vie, mais le projet est tombé à l'eau. »

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