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Daniel Arsham : la poignée dans le coin

Daniel Arsham fusionne art et vitesse en réinventant la moto comme une véritable œuvre sculpturale. Avec MV Agusta, il pousse encore plus loin sa vision d’une mécanique transformée en relique contemporaine. Par Aymeric Mantoux.

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L'artiste contemporain américain, l'un des plus cotés au monde, multiplie les collaborations avec les plus grandes marques. Passionné par la technologie et la vitesse, ce dingue de course et de mécanique, qui a déjà collaboré avec Porsche, signe une sculpturale MV Agusta 800 Superveloce.

C'est peu de dire que le sculpteur et designer est un dingue de ce qui va vite. Très vite. Lors du dernier Festival of Speed à Goodwood, Daniel Arsham n'a pas fait que de la figuration. Avec le Team Ikuzawa, ils ont préparé spécialement une Porsche 904. L'artiste est d'ailleurs un véritable passionné. Il a même designé une Porsche 911 Turbo 930 A qui s'est vendue plus de 800 000 dollars au printemps dernier.

L’art de la vitesse et des machines

« La voiture a été construite avec toute ma passion, confiait-il alors, et tout ce que je sais de l'histoire sportive de Porsche. La voiture a tant de détails exceptionnels qu'il est satisfaisant pour les amateurs de les trouver. Chaque partie du véhicule a été refaite ou conçue à partir d'une Porsche 930 originale. C'est une voiture vraiment spéciale. » De l'automobile à la moto, il n'y a qu'un pas. La vitesse, la cinétique et une passion pour l'art du mouvement caractérisent l'artiste dans sa pratique.

Reconnu pour son approche innovante et ses œuvres qui fusionnent art, architecture et design, son principe consiste à imaginer les futures reliques du monde contemporain, telles que les habitants du Xe millénaire les retrouveraient enfouies, comme des vestiges. « Quelle apparence auraient les icônes d'aujourd'hui passées au crible du temps ? » C'est exactement avec ce prisme qu'Arsham s'est attaqué à un autre mythe, MV Agusta.

Arsham comme MV Agusta est habitué aux séries limitées. Pas étonnant que leur collaboration ne débouche que sur 6 exemplaires, blancs immaculés. La couleur blanche est la marque de fabrique du plasticien originaire de Cleveland. Sa MV Agusta est plus une œuvre d'art qu'une moto, dont le prix n'a d'ailleurs pas été dévoilé. Il y a fort à parier que l'on retrouve ces exemplaires qui ne sont pas homologués pour rouler sur route dans les salons ou les galeries des collectionneurs davantage que dans leur garage. Daniel Arsham est intervenu sur le carénage, qu'il égratigne d'impacts supposés, ou auquel il intègre des cristaux évoquant une fossilisation, un processus archéologique.

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« J'ajoute une couche d'intemporalité à des objets du quotidien », a-t-il coutume de dire pour expliquer son geste. Ce qui distingue particulièrement Arsham, au-delà de ses installations sculpturales et de ses collaborations avec des marques prestigieuses, c'est sa fascination pour les bolides sur deux roues. Cette passion nourrit non seulement son travail, mais influence également sa vision artistique et sa manière d'interagir avec le monde. La vitesse est pour Arsham comme un concept artistique. Dans son œuvre, elle transcende la simple notion de mouvement.

Elle devient un symbole d'évasion, d'énergie et de dynamisme. Daniel Arsham voit la vitesse non seulement comme une caractéristique des machines qu'il admire, mais aussi comme un état d'esprit, une façon de percevoir la réalité. Les motos représentent pour lui bien plus qu'un moyen de transport. Elles incarnent la liberté, l'adrénaline et un lien profond avec la mécanique. Cette passion est palpable dans plusieurs de ses œuvres. L'artiste possède d'ailleurs une collection impressionnante de motos vintages et modernes, qu'il considère comme des objets d'art à part entière.

Une vision artistique du mouvement

Chaque moto est pour lui une œuvre unique, reflétant non seulement l'ingénierie mais aussi l'esthétique et l'histoire. Lors d'expositions, il a souvent intégré des éléments de la culture motocycliste, jouant avec des formes, des matériaux et des textures qui évoquent le monde des deux-roues. Son utilisation de la résine, du plâtre et d'autres matériaux dans ses sculptures s'inspire des lignes épurées et des courbes aérodynamiques des motos. Ce qui lui permet aussi d'explorer l'intersection entre art et design industriel.

La fulgurance de la carrière d'Arsham et sa persistance ne connaissent aucune érosion. Un phénomène rare qui s'accentue et s'étend même géographiquement, comme en Asie. En 2003, Daniel Arsham, qui a étudié à Cooper Union à New York, se voit remettre le Gelman Trust Fellowship award et le GNMH award qui attirent l'attention du petit monde de l'art contemporain sur lui. Depuis, il décolle, et devient l'un des artistes les plus courus et les plus chers, exposant dans le monde entier, de Paris à Shanghai ou Tokyo. Il collabore avec Porsche, Kim Jones (Dior), ou encore la Pokemon company et est représenté notamment par le grand galeriste parisien Emmanuel Perrotin.

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Arsham se fait connaître pour son archéologie mythique contemporaine qui consiste à aborder des objets et des symboles familiers et à les éroder pour leur donner un nouveau sens, une nouvelle dimension. Il crée des reliques du futur en imaginant, comme dans une démarche originale d'art-fiction, le devenir des choses qui comptent pour l'époque et nous environnent. L'artiste américain protéiforme s'est fait connaître du grand public au tournant des années 2010, avec l'avènement de la drop culture lorsqu'il a mis en vente ses multiples en direct à prix fixe sur eBay.

En quelques minutes, plusieurs centaines d'exemplaires de ses sculptures se sont évaporées à travers le monde, provoquant même un blocage du célèbre site. Du jamais-vu à cette échelle pour un artiste contemporain. Un phénomène permis par l'essor d'Internet et de la street culture de labels jusque-là confidentiels, qui s'est étendu aux sneakers ou aux collectibles de la street culture, comme les figurines ou sculptures consuméristes de l'artiste Kaws.

Arsham, une icône mondiale de l’art contemporain

Depuis, Daniel Arsham est l'un des artistes contemporains les plus demandés. Tiffany, Dior, Porsche, s'attachent à prix d'or ses services et son talent. Le type semble insatiable, increvable. Multiplie les projets, les expositions en Chine, dessine tous les jours, conduit des 911 sur tous les circuits et les transforme en sculptures roulantes. Il est l'un des rares artistes globaux, internationaux et iconiques comme Murakami ou Andy Wharol. Il travaille sans cesse, ne s'arrête jamais.

« J'aime documenter mes voyages, prendre des photos, capturer des moments, des matières et des expériences. Parfois c'est difficile pour moi de m'asseoir et de profiter du moment, même lorsque je voyage pour le travail. » Arsham est une icône de l'art contemporain, plus qu'un talent du moment. Son aura, sa personnalité le dépassent, comme l'a bien compris Agusta. Elle s'est notamment hissée sur ses épaules pour acquérir davantage de notoriété.

D'ailleurs Daniel Arsham collabore régulièrement avec des marques de niche, de luxe et de mode, Dior entre autres pour des défilés ou des collections capsules, également Tiffany ou Moët et Chandon. Il ne s'agit pas juste d'un phénomène de mode ou d'une passade, mais d'une histoire qui dure. Protégé notamment de Bernard Arnault, le New-Yorkais voit sa cote grimper sans cesse, malgré les bégaiements du marché de l'art ces derniers mois. Un signe qui ne trompe pas.

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