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Simone Zanoni : Sous une bonne étoile

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Simone Zanoni Photo
© François Darmigny
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Déjeuner avec Simone Zanoni ? « Impossible ! » Non par volonté mais parce qu'à ce moment, le chef est en cuisine. Ce sera donc un petit déjeuner. 08 h 58.

Dans le patio de l'hôtel Four Seasons George V, on savoure ce cadre magique. 09 h précises, la silhouette noire chaussée de baskets fluo apparaît.

Une tête de mort brodée orne sa veste de chef étoilé, un détail qui souligne son esprit rebelle… « Ciao ! Come stai ? » Simone sourit, embrasse, met à l'aise. Un cappuccino pour lui, un double expresso pour nous. On l'interroge d'emblée sur le port d'une montre à chaque poignet. Il se penche légèrement en avant et explique de son accent inimitable : « Ce n' était pas une question de style comme beaucoup de personnes l'ont dit… » Il se préparait pour le marathon des Jeux Olympiques du 10 août dernier qu'il a terminé en 3 h 49. L'une des montres était connectée à son coach en Suisse pour suivre ses progrès quotidiens. « J'ai gardé le suspense, avoue-t-il avec malice, je n'y regardais pas l'heure. L'autre est ma montre plaisir.

« Pour moi, le luxe, c'est pouvoir s'offrir la montre dont on rêve, celle qui nous fait vraiment plaisir. »

Oui, j'aime les montres depuis mes 16 ans. » Aujourd'hui, il confie être devenu accro à la course à pied et continue de s'entraîner pour de nouvelles épreuves. « Je vais donc garder mes deux montres », reflets de son équilibre entre passion et style unique. On lui fait remarquer que sa montre connectée est bien accompagnée… par une montre de luxe. Il la regarde et explique : « Je ne souhaite pas classer le luxe en fonction du prix. Pour moi, le luxe, c'est pouvoir s'offrir la montre dont on rêve, celle qui nous fait vraiment plaisir. Ma première montre, c' était une Breitling Navitimer à fond blanc, un modèle que je convoitais depuis longtemps. Dans les années 9 0, c' était un véritable luxe de pouvoir s'offrir ce plaisir. » Le chef raconte avec gourmandise que c'est le père de son meilleur ami, Nicola Praitano, qui lui a transmis cette passion. À l'âge de 16 ans, alors qu'il travaillait l'été dans un restaurant de montagne, il profitait de son temps libre pour rendre visite au père de Nicola qui tenait une boutique de réparation. Un jour, il lui a donné une Swatch automatique et lui a lancé un défi: « Démonte-la et remonte-la. » Cela a nourri chez Simone une fascination profonde pour l'horlogerie. Le chef n'est plus là ; il remonte le temps et se souvient que c'est encore grâce à Nicola qu'il achète sa première Rolex Daytona Automatique en acier d'occasion. Pourquoi Rolex ? Tout sourire, il souligne qu'en Italie, la Rolex est bien plus qu'une simple montre, c'est un symbole de réussite. « Les Italiens sont très Rolex, comme ils sont aussi très Porsche. Même si les choses évoluent en Italie, la Rolex reste un marqueur social fort. » Avec humour, il précise : « En France, Jacques Séguéla avait dit : si t'as pas une Rolex à 50 ans, tu as raté ta vie ! En Italie, on ne pense pas qu'il soit nécessaire d'attendre aussi longtemps pour posséder une Rolex ! » Alors Simone Zanoni : passionné ou collectionneur ?

Pragmatique, il se considère comme un « amateur passionné. » Il aime les montres mais apprécie par-dessus tout de les porter. Chacune d'entre elles a une valeur personnelle et économique. Pratique, il les préfère à son poignet plutôt que dans une vitrine ou dans un coffre. Pour lui, « le plaisir est profondément lié à l'action et à l'expérience réelle. C'est comme avec la moto ; j'aime la conduire ». Et de conclure : « Les montres jouent un rôle pratique dans mon quotidien en m'aidant à organiser mon temps. C'est cette utilité concrète qui me permet de savourer ce plaisir. » De laquelle est-il le plus fier ? Simone réfléchit un instant : « Si on parle de fierté, je crois que c'est la Daytona. Toutes mes montres racontent une histoire, et celle-ci, à fond blanc, est particulièrement spéciale. En 20 08, je venais de recevoir mes deux étoiles au Trianon Palace. Je me suis offert cette montre car elle représente un accomplissement personnel, mais aussi un moment important de ma vie. Elle a marqué une charnière dans ma carrière. » Il confie ainsi aimer l'idée d'acheter des objets pour marquer des moments importants de la vie. Quand il la regarde, l'histoire et les émotions de cette période lui reviennent.

Pour autant, il ne la transmettra pas à son fils. « Cette Rolex a marqué ma vie, pas la sienne ! En revanche, j'en ai acheté une pour chacun de mes enfants. Une Daytona où est gravé : “Cette montre appartient à Cesare mais ne peut être vendue.” Pareil pour ma fille Penelope. Je crois que ces inscriptions marquent leur caractère unique et leur valeur personnelle. » Naturellement, la conversation s'oriente vers la Richard Mille que porte Simone. « C'est encore une histoire de passion.

« J'ai utilisé la chaleur du moteur de ma Nissan GTR pour cuire le dos de saumon de Richard Mille. »

Avant de parler de la montre, je voudrais d'abord évoquer Richard Mille. On se connaissait un peu, je savais que nous partagions une passion pour l'automobile. Un jour, j'ai organisé un déjeuner au restaurant et je lui ai proposé de préparer un plat spécial pour lui. J'avais garé ma Nissan GTR près de la terrasse, j'ai fait un tour avec le pilote Romain Grosjean. De retour au restaurant, j'ai utilisé la chaleur du moteur pour cuire son dos de saumon. C' était une cuisson parfaite et un moment mémorable qui a scellé notre amitié. » Et Zanoni de poursuivre qu'ils se sont aussi rendu compte qu'ils partageaient des valeurs communes sur la famille et leur époque. « Richard est quelqu'un d'ultra-simple, très accessible et vraiment cool. Et pourtant, derrière cette simplicité se cache une mécanique de pensée tellement extraordinaire qu'il peut concevoir des montres ultra-compliquées. Je trouve qu'il a écrit une des plus belles histoires de l'horlogerie moderne. » En regardant sa montre, il fait remarquer qu'il a un poignet fin et qu'il préfère les tocantes légères. « Il y a quelques années j'ai porté une Patek à la fois fine et légère. » Aujourd'hui, il éprouve énormément de plaisir avec la RM10, bien que les connaisseurs reconnaîtront sur la photo une RM67. « Richard Mille a réussi à créer des montres qui ne pèsent que quelques grammes. C'est magique. » Le chef observe autour de lui et poursuit à voix basse. « Je vais vous faire une confidence. Comme vous le savez j'ai une tête de mort brodée sur toutes mes tenues. La montre de mes rêves est la R M 052 Skull. En choisissant d'incorporer le symbole complexe du “vanitas vanitatum” dans le mécanisme de la montre, Richard Mille représente à la fois une promesse d' éternité et un rappel de vivre intensément. C'est une véritable Bomba Atomica ! » Le temps file, il nous reste trois dernières questions. Quelle montre pourrait être associée à l'un de ses plats “signature” ? Sans hésiter, il évoque la RM27 et les agnolotti de veau braisés avec les pleurotes qui partagent des caractéristiques similaires : légèreté, élégance et travail complexe. « Cette montre avec son mélange de carbone et de strap est à la fois résistante et raffinée tout comme mon plat qui allie sophistication et légèreté. » Le chef étoilé souligne que, tout comme le strap sur la RM27, le citron dans son plat semble improbable mais sublime. Rencontrer le chef Zanoni sans parler cuisine est impossible. On comprend que le succès d'un repas dépend d'une gestion minutieuse du temps. Il nous livre un secret de sa perfection : « J'ai constaté que le délai entre la cuisine et la salle influençait la qualité des plats.

« J'apprécie trop le temps pour le perdre. Le temps ne s'achète pas.
Ne se collectionne pas. C'est la mesure la plus précieuse. »

Nous avons donc modifié la cuisson de certains plats en fonction du trajet moyen entre la cuisine et la salle. Ce trajet moyen dans mon restaurant est de 90 secondes. J'ai ajusté la cuisson du bar en le faisant cuire uniquement côté peau et l'autre côté reste cru. Ces 90 secondes sont cruciales car elles permettent au poisson de finir de cuire dans le bouillon pour arriver parfait à table. » À l'ultime question : « Que ferait le chef s'il avait une heure à perdre ? », Simone Zanoni sourit, se lève, nous salue et lance : « J'apprécie trop le temps pour le perdre. Le temps ne s'achète pas. Ne se collectionne pas. C'est la mesure la plus précieuse. Je profite de chaque seconde. A presto ! »

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