S'abonner

François Berléand : L'ivresse du poussoir

Publié le Écrit par La Rédaction
François Berléand Photo
© François Darmigny
Couverture complète sur mise-en-avant

À onze ans, ma grand-mère m'a offert ma première montre, une Jaeger-L eCoultre.

Pendant des années, je n'ai porté que celle-là. » Vernis le garçon. À l'âge encore des culottes courtes, il étrennait à son poignet une mécanique que bien des adultes aujourd'hui lui envieraient. François Berléand, grand amateur de vin au passage, a forcément pris de la bouteille. Il a aujourd'hui 68 ans et une carrière qui l'aura porté du théâtre subventionné aux plus exquises des salles privées parisiennes, des séries B d'action estampillées Luc Besson (la saga Le Transporteur ) à de savoureuses collaborations avec Claude Chabrol (L'Ivresse du pouvoir, La Fille coupée en deux ). « Je continue toujours le cinéma, confesse-t-il. Mais mon vrai bonheur reste de jouer sur les planches. Vous êtes sans filet, à tenir 1 h 30, devant des gens que vous devez amener doucement à vous. » Par un bel après-midi, dans son appartement du 6e arrondissement de Paris, il souhaite nous montrer la pièce qui lui tient à cœur. Pas une à délivrer face au public, mais la Chopard extraplate en platine, cadeau de son père. « Il me l'avait offerte pour mes 21 ans.

Pour moi, c'est un accessoire complètement sublime. » Et voilà le comédien comme emporté par l'objet et le flot de ses souvenirs, devant une montre aux valeurs multiples - généalogique, sentimentale et de style -qu'il tient au bout de ses doigts. En la fixant, François Berléand répète, tel un mantra : « Qu'est-ce qu'elle est belle... Qu'est-ce qu'elle est belle... Qu'est-ce qu'elle est belle... » Il se ressaisit presque : « À un moment, j'ai eu peur de la perdre. Alors, j'ai acheté une autre montre.

Pour nous les hommes, c'est peut-être le seul bijou que nous pouvons nous autoriser. » Là, il commence à égrener le chapelet de marques qu'il a arboré au fil de sa carrière : une Reverso Jaeger-LeCoultre, une IWC, une Zenith... Pour assumer, au débotté, qu'il a « des goûts très classiques ».

Histoire(s) de famille

« J'aime les montres élégantes et discrètes. Argentées ou en acier. Rien de tapageur. Et mes poignets sont fins. Si je porte une grosse montre, je vais basculer. » L'image, assurément cocasse, le fait sourire par avance. François Berléand revient à l'objet de toutes ses attentions, la Chopard offerte par son père, vendeur de gadgets en tous genres à l'époque où le bibelot d'inspiration américaine vivait son âge d'or. « L'histoire de la Chopard est extraordinaire, se délecte-t-il. Mon père me l'a donc offerte pour mes 21 ans. Je l'ai offerte à mon fils, Martin, pour ses 21 ans. Et il l'offrira à son tour à son fils, d'ici une dizaine d'années. C'est beau quand une montre devient symbole de transmission. » Après la séance photo, la Chopard retournera à son nouveau propriétaire, Martin donc, qui officie dans la production de films.

Sinon, que porte le sieur Berléand à son poignet ? Pour l'inst a nt, rien. Le comédien, qui vient de connaître un joli succès avec la pièce Freud et la femme de chambre, préfère se prévenir de tout larcin ou de toute étourderie : « Le problème, c'est que je joue souvent au théâtre.

Quand j'incarne Freud, je ne porte pas de montre au poignet. Lui avait une montre à gousset. Ma montre, si je l'amène au théâtre, j'ai peur qu'on me la vole, ou de la perdre... Alors, j'ai moins l'occasion d'en porter. »

« J'ai même eu la chance que des femmes m'offrent de superbes montres. Mais j'en ai quinze, vingt. Pas mille. »

Sa Zenith à lui

François Berléand avoue fonctionner au coup de cœur : « Lorsque j'ai envie d'une montre, je me renseigne, je regarde dans les boutiques. Il faut que les vendeurs m'autorisent à la garder un peu au poignet. Je peux également acheter des montres d'occasion. J'ai même eu la chance que des femmes m'en offrent de superbes.

Mais, en tout, j'ai quinze, vingt pièces. Pas mille. » Avant de retrouver au théâtre Sophie Marceau pour entamer la tournée de La Note d'Audrey Schebat, l'homme se permet un détour par ses souvenirs horlogers. Il raconte : « Ce qui est agréable, avec les montres, ce sont aussi les rencontres. Un jour, j'ai parlé de ma Zenith dans une interview. Le patron de la marque est venu me voir au théâtre pour me remercier. » La suite ? « Il aurait pu m'offrir une montre, mais il ne l'a pas fait » décoche-t-il de son inénarrable humour à froid, milord vénérable des abords des Jardins du Luxembourg. Pour se rattraper illico aux branches de ses platanes bicentenaires.

L'interprète de Rachin, l'inflexible directeur d'école du fructueux Les Choristes, termine sur une note douce : « Gentiment, il a fait réviser ma montre. Et puis, un jour que j' étais de passage en Suisse, il m'a proposé de visiter ses ateliers. Mais je n'avais pas le temps. Je le regrette.

Zenith crée ses montres de A jusqu'à Z, avec son propre mouvement. Pour moi, c'est la plus belle montre que je possède. Pas la plus chère, mais sûrement la plus belle. Avec la Chopard. Mais celle-là ne m'appartient déjà plus. »

Mentionnés dans cet article

Écrit par La Rédaction
Partagez cet article partout

Dernières news sur mise-en-avant

Frank Huyghe : en apesanteur

Frank Huyghe : en apesanteur

La marque française indépendante Ralf Tech a réussi à passer des profondeurs océaniques à l'infini de l'espace. Personne ne l'attendait là-haut. C'est pourtant Ralf Tech, spécialiste de la plongée, qui décroche une collaboration avec le CNES et réalise la première montre française de l'espace ! Par Carine Lœillet.

Charles Caudrelier, la brise de la cinquentaine

Charles Caudrelier, la brise de la cinquentaine 

Après sa victoire sur la Route du Rhum, le skipper vient de remporter l'Arkea Ultim Challenge Brest, nouvelle course en solitaire autour du monde. Le Finistérien au CV bien trempé a conquis la planète avant de s'imposer en France. Par Xavier de Fournoux.

Heroin Purr riding : road strip

Heroin Purr riding : road strip 

Libre, indépendante, équipée en série d’une bonne dose de sensualité et, en option, d’un pack badass : voici Jacquie. Créatrice de contenu moto sous le pseudo Purr Riding, Jacquie c’est un peu Thelma et Louise à elle seule. Une femme authentique qui se met à nu dans Moto Heroes pour démontrer que tout est possible. Par Ethan Valentin.

Vincent Ipslanti : les chevaux du plaisir

Vincent Ipslanti : les chevaux du plaisir 

Si l'on fait exception du cheval, sur le capot ou sur la fesse, ces deux voitures, la Ford Mustang et la Ferrari 348, ont autant de similarités qu'un hamburger et des tagliatelles. Leur point commun en réalité est un homme de passion aux multiples casquettes. Par Ethan Valentin.

Bellini yacht : una nuova vita

Bellini yacht : una nuova vita

Né en 1960, ce chantier installé en face de Riva a développé une identité originale, construisant ses propres modèles en bois verni et restaurant ceux de son prestigieux voisin. Après des années de transition, voyant le fils Bellini succéder à son père, le chantier de Clusane relance aujourd'hui une nouvelle gamme de prestige. Par Philippe Leblond.

Julien Roucheteau : devoir de réserve

Julien Roucheteau : devoir de réserve

Prendre des risques, parfaire, sublimer un produit, atteindre des sommets, recommencer. Y aurait-il quelques analogies entre gastronomie et moto ? Le temps d'une interview, Julien Roucheteau, Meilleur Ouvrier de France et chef étoilé de La Table des Rois, nous donne des éléments de réponse. Par Arnaud Choisy.

Couverture complète sur mise-en-avant >

Sur le même sujet

Frank Huyghe : en apesanteur

Frank Huyghe : en apesanteur

La marque française indépendante Ralf Tech a réussi à passer des profondeurs océaniques à l'infini de l'espace. Personne ne l'attendait là-haut. C'est pourtant Ralf Tech, spécialiste de la plongée, qui décroche une collaboration avec le CNES et réalise la première montre française de l'espace ! Par Carine Lœillet.

Rolex Comex : joyau d'abysses

Rolex Comex : joyau d'abysses

Référence absolue pour les connaisseurs des montres de plongée, les Rolex COMEX s'arrachent à prix d'or. Pour la première fois de son histoire, l'entreprise marseillaise d'ingénierie maritime, d'ordinaire ultra-secrète, nous a ouvert ses portes et dissipe les mystères qui entourent ces précieuses montres. Par Frédéric Brun.

Laurent Grasso x Bulgari : la tête dans les nuages

Laurent Grasso x Bulgari : la tête dans les nuages

Entre art contemporain et haute horlogerie, Bulgari s'associe à Laurent Grasso pour réinventer son emblématique montre Octo Finissimo. Une collaboration où le temps devient matière à création. Par Camille Bois-Martin.

Du côté de Paris : L'heure Paname

Du côté de Paris : L'heure Paname

Si la place Vendôme et la rue de la Paix abritent les plus grandes maisons, la Ville Lumière regorge d'autres adresses où l'horlogerie est pensée, façonnée et mise en… lumière ! a rencontré les acteurs qui donnent à Paris son supplément d'âme et ce fameux “je-ne-sais-quoi” dans l'univers de la montre. Par Marine Ulrich.

Novak Djokovic : Hublot au filet

Novak Djokovic : Hublot au filet

Le joueur de tennis le plus titré de l'histoire en Grand Chelem, champion olympique à Paris, a développé avec Hublot un composite fabriqué à partir de ses raquettes et des polos qu'il a portés lors de son homérique saison 2023. Djokovic, de passage à Paris pour son lancement, est revenu sur la genèse de cette montre limitée à 100 modèles. Par Arnaud Ramsay.

Renaud Capuçon : Complications & partitions

Renaud Capuçon : Complications & partitions

Renaud Capuçon se livre avec simplicité sur sa passion méconnue pour les montres. Des Swatch de son adolescence aux pièces iconiques, il raconte comment le temps l’accompagne depuis toujours. Par Jean-Pascal Grosso.