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Ferrari 250 GT California - Alain Delon : La Ferrari du Samouraï

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Ferrari 250 GT California - Alain Delon : La Ferrari du Samouraï
© Artcurial, Gamma Rapho Keystone
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En mai 1963, déjà amateur d'automobiles exclusives, Alain Delon rachète la Ferrari 250 GT California de son ami comédien Gérard Blain qui lui a véritablement tapé dans l'œil. Avec sa robe bleu nuit, hard-top assorti et intérieur simili noir, c'est une voiture rare, magnifique, une voiture de star pour celui qui s'est vu consacré en seulement deux films tournés en 1960 : Plein soleil et Rocco et ses Frères. Le 23 mai 1963, Delon la fait immatriculer en Principauté de Monaco (4452 MC) mais la voiture va surtout résider à Paris et être utilisée par la star pour se rendre sur certains tournages. L'occasion d'inviter à son bord quelques séduisantes passagères avec qui il partage l'affiche, telles que Jane Fonda, sa partenaire dans Les Félins de René Clément, ou Shirley McLaine qu'il côtoie dans La Rolls-Royce jaune d'Anthony Asquith. En 1964, attiré par les sirènes d'Hollywood, Delon s'installe quelques temps en Californie avec sa femme, Nathalie. L'acteur se fait expédier la 250 GT à Los Angeles, occasionnant le remplacement des répétiteurs de clignotants sur les ailes avant afin de correspondre aux normes américaines, mais la voiture conservant durant tout le séjour ses plaques monégasques. En 1964, Alain Delon s'installe quelque temps en Californie et se fait expédier la Ferrari 250 GT à Los Angeles.  Certaines photos montrent le couple en balade à Beverly Hills dans la 250 GT, tandis que sur une autre, Delon vérifie la pression des pneus dans une station-service. En juillet 1965, deux ans seulement après l'avoir acquise, Alain Delon va revendre sa Ferrari. Sortie de l'usine de Maranello en septembre 1961 (châssis 2395GT), cette 250 GT fait partie des 52 exemplaires produits en version SWB (Short Wheel Base / châssis court) et c'est l'une des 37 SWB pourvues de phares avant carénés. Sa carrière débute sur le stand Ferrari au Salon de l'Auto de Paris où le comédien Gérard Blain la remarque et décide de se l'offrir en remplacement de sa Ferrari 250 GT Série 1 (ex-voiture du Salon de Paris 1957) qu'il vient de faire re-prendre par Franco-Britannic Autos. Blain a le vent en poupe à cette époque, on l'a vu dans Le Beau Serge de Claude Chabrol (1958) et il va bientôt jouer dans Hatari ! d'Howard Hawks avec John Wayne. Il va conserver la voiture durant moins de deux ans, jusqu'à ce que son ami Alain Delon, séduit par la ligne racée du bolide et son V12 2,9 litres de 280 chevaux, ne propose de s'en porter acquéreur. 

Ferrari 250 GT California Photos
© Artcurial, Gamma Rapho Keystone

Remise en vente par Delon, elle est acquise en août 1965 pour 30 000 francs par Paul Bouvot qui dirige le Centre de Style des Automobiles Peugeot où il n'hésite pas à se rendre chaque jour à son volant, faisant grincer les dents de quelques collègues qui le verraient mieux dans une 404. Bouvot va parcourir quelques 25 000 kilomètres avant de revendre la 250 GT en mai 1966. Trois autres Parisiens vont se succéder à son volant jusqu'en novembre 1971 lorsque un certain Jacques Baillon en devient le septième propriétaire, le début d'un long sommeil pour la belle Italienne. Désireux de sauvegarder le patrimoine automobile et de lui consacrer un musée, le père de Jacques Baillon, Roger, patron d'une entreprise de transport, avait frénétiquement entassé dans les jardins et recoins de sa propriété près de 200 voitures lorsqu'il fit faillite en 1978.  Après deux ventes aux enchères organisées en 1979 et 1985 pour rembourser les créditeurs, il restait encore 114 voitures, et non des moindres, dans les annexes du château acquis par Baillon dans les années 50 : Bugatti, Lagonda, Talbot, Delahaye et autres Delage. Baillon meurt en 1996 et son fils Jacques, collectionneur comme lui, s'éteint en 2013. L'ex-Ferrari 250 GT d'Alain Delon va être estimée entre 9 et 12 millions d'euros, ce qui va considérablement agacer la star.  En novembre 2014, Pierre Novikoff et Matthieu Lamoure, de la maison Artcurial, vont être sollicités par la famille afin de mettre en vente les restes oubliés du prestigieux cheptel. Sur place, les deux spécialistes vont tomber sur le Graal. 

Ferrari 250 GT California Photos
© Artcurial, Gamma Rapho Keystone

Dans un garage délabré, sous une pile de magazines et avec pour colocataire un des quatre exemplaires de Maserati A6G Gran Sport de 1956 dessinés par Frua, somnole la Ferrari 250 GT SWB de 1961 ex-Alain Delon, poussiéreuse et patinée mais dans un état général exceptionnel. « C'est un modèle 'matching numbers', précisera Lamoure peu après la découverte, avec la clé toujours sur le contact, le livret d'entretien original et des cartes routières de l'époque. » Dans le coffre, on retrouvera les plaques monégasques montées à l'époque de Delon et, sous un siège, les répétiteurs de clignotants d'origine qui avaient été remplacés à l'occasion du séjour de la Ferrari aux Etats-Unis. Devenue le lot 59 de la vente Artcurial “Collection Baillon” organisée durant le salon Rétromobile 2015 et officiellement présentée comme l'ex-voiture d'Alain Delon, la Ferrari 250 GT va être estimée entre 9 et 12 millions d'euros, ce qui va considérablement agacer la star. « La maison de vente se sert de mon nom pour faire monter les prix, se plaindra-t-il. Elle m'a appartenu pendant deux ans seulement, de 1963 à 1965, au moment du film “Le Guépard” et je l'ai revendue il y a donc cinquante ans ! » Delon va dénoncer ce qu'il appelle une supercherie, regrettant que l'appellation « Ferrari de Delon » ne serve qu'à « enflammer les estimations » et certifiant par ailleurs que la photo le montrant aux côtés de Jane Fonda dans la 250 GT sur le tournage des Félins en 1963, figurant en couverture du catalogue Artcurial, aurait en fait été prise dans une autre Ferrari que celle mise en vente... La 250 GT va être vendue 14,2 millions d'euros le 6 février 2015, un double record, pour une Ferrari California et pour la maison Artcurial. Une semaine après la vente, le spécialiste américain en restauration automobile, Paul Russell, va être contacté pour entreprendre une minutieuse révision de la voiture avant son apparition au Concours d'Elégance de Pebble Beach quelques mois plus tard, sans toutefois toucher à sa patine originale, une demande expresse du nouveau propriétaire. Mais en 2018, c'est une 250 GT entièrement restaurée qui va faire sensation au Concours d'élégance de la Villa d'Este... et relancer le débat sur le thème “restauration ou préservation” de tels véhicules sortis de grange. « Il faut que tout change pour que rien ne change », avait dit Delon dans Le Guépard. L'histoire ne dit pas ce que la star a pensé de cette renaissance.

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