Totem Automobili GT Electric : Choc culturel

Entre restomod et retrofit, soit l'art d'accommoder les Anciennes avec l'air du temps en piochant dans la technologie actuelle pour concilier charme d'antan avec performance et fiabilité, le designer italien Riccardo Quaggio nous propose une évocation néo-rétro inspirée par l'Alfa Romeo GTA (acronyme de Gran Turismo Alleggerita), une jolie petite boule de nerfs aux galbes sensuels à souhait, produite à 124 exemplaires entre 1965 et 1975. Le projet GT Electric de Riccardo Quaggio (diplômé de l'Istituto d'Arte Applicata e Design à Turin et fort d'une expérience chez Honda R&D et Fiat Chrysler Automobiles) démarre en 2018. Son projet aux allures d'odyssée mécanique, sur le papier, est simple, pertinent puisque l'ère des moteurs thermiques est comptée, mais sa mise en œuvre est complexe, elle requiert de multiples compétences : proposer des voitures électriques en utilisant comme point de départ des Alfa GT Junior 1300/1600 de 1970 à 1975, moins exclusives que les GTA (valant dix fois plus chères) qui méritent, elles, d'être préservées et restaurées à l'origine vu leur rareté. La baseline de la start-up Totem Automobili, implantée à Marcon, dans le Nord-est de l'Italie, en Vénétie, annonce la couleur : « A legend reborn with electric soul. » Le challenge est de taille, fédérant une équipe de 32 personnes parmi lesquelles 21 ingénieurs et 150 partenaires techniques (Brembo, Pirelli, Bilstein. ..) dont 90 % sont italiens. Pas moins de 8 000 heures de travail et de tests ont été nécessaires pour donner vie à la remarquable vision du jeune designer passionné d'automobiles historiques et très attaché à faire vivre la légende des belles carrosseries transalpines. Le résultat est sous vos yeux, à travers les images glamour mises en scène par le photographe Patrick Curtet lors d'une séance photo sur le port de Long Beach, avec la complicité des frères Bridan, où la diva transitait entre deux salons. Au-delà de la séduction immédiate qui opère, la belle Italienne peut revendiquer sa légitimité en terre californienne, pionnière en termes de véhicules zéro émission, acteur majeur de la locomotion vertueuse (l'état le plus peuplé du pays vise les cinq millions de véhicules sans émissions polluantes d'ici 2030), où elle trouve un champ d'action à la mesure de ses ambitions, pour des clients enthousiastes, connaisseurs, sensibles au charme latin et fortunés, capables de débourser un minimum de 430 000 euros pour acquérir l'un des vingt exemplaires produits à la main.

Un tarif conséquent, certes, mais qui se justifie par la somme considérable de travail effectuée par le staff de Totem et le très haut degré de finition qui fait de chaque exemplaire une véritable œuvre d'art. Sans parler de la satisfaction de conduire une auto que vous ne croiserez pas au premier carrefour. Il ne s'agissait pas d'intégrer une motorisation électrique dans une vieille guimbarde en croisant les doigts pour que tout rentre au chausse-pied, quitte à découper, meuler, souder, et en espérant que la chance soit de la partie, mais de carrément imaginer et construire une nouvelle voiture, techniquement très aboutie, offrant un luxe et un confort sans comparaison avec l'offre initiale, capable d'encaisser un important surcroît de puissance, conservant son ADN de sportive, donc, avec des trains roulants, des suspensions et un freinage ad hoc, qui plus est homologuée, en tenant compte des contraintes inhérentes à l'exercice. Le challenge de Totem Automobili est ambitieux, fédérant 32 personnes et 150 sous-traitants. Un cahier des charges qui ne devait en aucun cas se faire au détriment du style. Pour prendre la mesure de l'ampleur de la démarche réalisée par Totem Automobili, notez que 90 % du châssis a été repensé, au profit d'une structure en aluminium renforcée par un arceau cage, qui reçoit des suspensions McPherson à l'avant et multibras à l'arrière sur lesquelles viennent se greffer des disques Brembo (345 x 28 mm à l'avant et 320 x 48 à l'arrière) et des jantes de 17 pouces accueillant des gommes Pirelli P Zero en 205/40 et 245/40, avec la possibilité de monter des pneus plus larges si le client le souhaite. En lieu et place du quatre cylindres, la GT Electric accueille un moteur électrique de 120 kg alimenté par 420 kg de batteries développant 63,9 kWh et autorisant 390 kilomètres d'autonomie, une vitesse de pointe de 255 km/h, une capacité de passer de 0 à 100 km/h en moins de trois secondes. La recharge s'effectue à 80 % en 15 minutes et en 1h15 pour repartir avec toute la puissance, soit, accrochez-vous, 590 chevaux et 1100 Nm de couple. Pas de quoi regretter ce bon vieux moteur à explosion dont le rendement était loin d'être optimal. D'autant que si la motorisation électrique se veut vertueuse, elle peut également être synonyme de plaisir de conduite grâce à la technologie McFly de Zelectron, partenaire de Totem Automobili, qui permet, via treize haut-parleurs, de restituer une ambiance sportive en personnalisant les sons, les vibrations en fonction de la vitesse, et des rapports de boîte. Fermez les yeux, vous êtes dans le col du Turini, vous accélérez et la Giulia se met à danser. ..

Malgré le poids non négligeable des batteries, la GT Electric ne pèse que 1 270 kg grâce à l'emploi massif d'aluminium et de fibre de carbone, notamment au niveau de la carrosserie (95 kg) dont les lignes gagnent en force pour une émotion esthétique plus intense avec la suppression des gouttières et des pare-chocs. Du châssis original de l'Alfa Romeo, il ne reste plus que 10 %, remplacé par une structure en aluminium. Au premier coup d'œil, la GT Electric s'inscrit dans le sillage de l'Alfa Romeo, mais elle est plus basse de 5 centimètres et plus large de 18 centimètres, ce qui renforce son agressivité. Si d'extérieur, la GT Electric interpelle par son élégance intemporelle, le soin apporté à l'habitacle (personnalisable et sur-mesure en fonction du gabarit du conducteur) est tout aussi remarquable, avec ses clins d'œil au passé au niveau du volant, des sièges baquets Sabelt en carbone, l'utilisation massive d'aluminium pour le levier de la boîte automatique, le pédalier, les commandes. .. Riccardo Quaggio exprime sa sensibilité à travers chacun des éléments étudiés avec subtilité qui permettent une vie à bord où la climatisation, les vitres électriques, le démarrage sans clé, le système audio et d'infodivertissement se mêlent avec un vent de nostalgie de cette époque où se glisser au volant d'une petite sportive avec la perspective de routes en lacets vous donnait le sourire. Avec la GT Electric, l'émotion est intacte et l'avenir ensoleillé. Totem Automobili concilie avec cette première réalisation la quête de frissons et l'assurance de pouvoir continuer à limer le bitume pendant les décennies à venir. Le meilleur des mondes. La carrosserie sensuelle, en fibre de carbone, ne pèse que 95 kg. Le poids, l'ennemi de la performance...