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Patricia Audebert : vitesse, l’élixir de jouvence

Modifié le Écrit par La Rédaction
Patricia Audebert : vitesse, l’élixir de jouvence
© Damien Lorrai & archives P.A.
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C'est Paty Audebert qui le dit : « Je suis passée de la poupée à la moto. Ma sœur avait des posters de beaux garçons chanteurs sur les murs de sa chambre et moi, j'avais ceux de Johnny Cecotto, Barry Sheene, Kenny Roberts, Giacomo Agostini, Patrick Pons… » Passées ses premières émotions en passagère sur les petites routes d'Eygalières sur une Kawasaki, Paty annonce la couleur à son père : « Je veux une moto ! » Il est d'accord, mais elle devra se l'acheter toute seule ! Elle a 15 ans et multiplie les jobs pour se la payer. Elle obtient son permis du premier coup et craque pour une Ducati 250 au réservoir pailleté, mais suit les conseils de son père qui recommande, avec lucidité, la fiabilité Honda. À la première 350 succéderont une 750 Four, Suzuki 750 GT et 380 GT préparée par Jacques Roca avant une Kawasaki 750 H2, un pur-sang dont la maîtrise exigeait du doigté. Paty enchaîne les motos et les accidents : un chauffeur de taxi qui ne s'arrête pas à un stop, un routier qui s'endort et la percute avec son semi-remorque de plein fouet, un automobiliste qui change de direction au dernier moment et envoie Paty valdinguer dans un canal… mais pas de quoi la décourager. Elle taille la route avec les potes pour faire les concentres en vogue à l'époque et assister aux Grands Prix et rondes de 24 Heures. En 1978, elle découvre que des courses sont réservées aux filles. Avec la complicité de Jean-Pierre Sanchez, elle acquiert une BPS 125 et décroche son premier titre tout en croisant le fer avec les hommes dans leur championnat respectif.

Paty cultive l'esprit de compétition avec un enthousiasme communicatif

En parallèle de la vitesse, elle met un pied en endurance “mixte” et se classe 2e avec Anne-Marie Spitz. Elle s'inscrit sur quelques épreuves en National au guidon d'une 125 Morbidelli, mais perçoit les limites de la compétition où l'argent est un frein à la performance. Mêlant sa vie sentimentale à la course, Patricia se lie à Guy Meynet avec lequel elle partage la même passion, et obtient des résultats probants, telle la victoire du championnat féminin Moto Eve en 1988. Un an plus tard, c'est le choc : au guidon de sa Honda VFR 750 RC 30, à cause d'une vis de purge du circuit d'eau mal serrée, car la moto sortait d'hivernage, le pneu arrière est aspergé et c'est la chute, violente : radius, cubitus, clavicule… Paty est durement touchée. Les os ont du mal à se ressouder, plusieurs greffes sont opérées, des plaques posées… Un véritable parcours de la combattante qui l'éprouvera plusieurs années. La compétition n'est plus à l'ordre du jour. Pour changer d'air, pendant deux décennies, Patricia sillonne le monde avec son sac à dos lors de voyages extraordinaires. En 2006, elle se laisse séduire par Robert Audibert, Bob pour les intimes, qui lui demande, en guise d'entrée en matière, si elle aime la moto… Bonne pioche ! Via l'intermédiaire de son mari, Patricia se remet en selle sur une Triumph 675 en championnat féminin Dream Cup, se classant au pied du podium qu'elle rate suite à deux chutes. Elle a la gniaque : « J'aime me surpasser, mais parfois, ça ne passe pas », pour autant elle doit retrouver ses marques sur une moto très différente de celles qu'elle chevauchait 20 ans plus tôt.

Elle se distingue par un pilotage très fluide où elle utilise toute la piste, comme elle le faisait à ses débuts en 125. Mais elle a fait évoluer le style notamment grâce aux conseils de Bernard Garcia, ex-pilote de GP, de l'école 4Gmoto où, au guidon de sa Yamaha YZF 600 R6 d'entraînement, elle travaille ses virages, là où se gagne la course. On propose à Patricia de rouler au Bol d'Or Classic sur une Honda 900 CBF. Dans le même temps, Ève et François gèrent l'intendance, d'autres forces, comme une chaîne d'amitié, se joindront à la petite équipe, séduites par l'énergie et la bonne humeur dont fait preuve cette femme qui ne cherche pas à faire jeune, mais qui est jeune : Jean-François, Laurence, Michel, Patou, Chonchon, Alain… Le puzzle se met en place pour que Patricia replonge dans la course avec intensité, en se fixant des objectifs qu'elle poursuit en allant au bout des choses, avec une détermination sans faille, qui inspire le respect. Chaque matin, loin de son métier initial dans un labo photo où elle travaillait sur des agrandissements professionnels, elle fait des ménages, du côté de Bandol, pour participer au financement de sa saison, un état d'esprit qui en dit long sur son engagement. « J'avais dit à 60 ans que j'arrêterais, mais on me fait des propositions et comme je suis faible, j'accepte » avoue-t-elle avec malice.

Tout sourire, Paty s'avère redoutable. Elle aime la précision, dans son approche de la course et dans son pilotage

Elle n'aime ni l'imprécision ni l'improvisation et fonctionne comme un pilote professionnel, en transmettant les bonnes informations lors de la mise au point de sa moto et en étant exigeante au niveau de la préparation : tout doit être prêt pour se concentrer sur la course. Bob, avec les yeux de l'amour, en véritable mécène, accompagne le mouvement et joue le jeu à fond. Il lui offre, en 2011, une Godier-Genoud 1135 Replica Performance, une machine datant du début des années 80, de 130 chevaux, imposante au premier regard, mais qui surprend par sa facilité de pilotage, sa tenue de route, son freinage, une mécanique dont il n'existe qu'une trentaine d'exemplaires, montés de toutes pièces par Alain Genoud.

À son guidon, sa bien-aimée court en endurance, notamment au Bol d'Or Classic, partageant le guidon avec Karine Sliz ou, cette année, avec Sonia Barbot, cinq fois championne de France de rallyes routiers. Pour Paty, l'aventure continue, poignée dans le coin, avec des projets et des rêves, comme rouler en duo avec Dylan, son petit-fils de 16 ans, lui aussi mordu de moto. L'image serait belle.

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