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Fondation Macaluso : transmission intégrale

Publié le Écrit par La Rédaction
Fondation Macaluso : transmission intégrale
© Rémi Dargegen
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Une collection automobile, hors celles uniquement constituées à des fins financières, est toujours intéressante pour ce qu' elle “raconte du collectionneur qui l' a patiemment construite. Dans le cas de la fondation Macaluso, la collection est totalement indissociable de son fondateur, l'horloger, entrepreneur et ex-copilote de rallye Luigi “Gino” Macaluso. Dire qu' il avait l' automobile dans le sang n' est pas trahir la réalité comme l'explique son fils Stefano : « Mon père a toujours considéré l' automobile comme l'expression culturelle et artistique la plus vivante du XXème siècle, et nous avons bâti la Fondazione Gino Macaluso Per L' Auto Storica en prolongement de cette idée. Il pensait que les voitures étaient le fruit du génie de designers et d' ingénieurs à qui il vouait la même estime qu' à Michel-Ange. Il le mettait sur le même plan qu' un Alec Issigonis ou qu' un Giorgetto Giugiaro par exemple. » Macaluso s' est passionné très tôt pour l' automobile et plus particulièrement pour les automobiles de rallye qui sont au cœur de la collection actuelle. Étudiant en architecture à l' école Polytechnique de Turin, fasciné par les exploits des champions automobiles, Macaluso a souhaité s' initier aux rallyes avec un ami étudiant.

« Les rallyes étaient très populaires en Italie à l' époque et, grâce à ses bons résultats en tant que copilote, mon père a été engagé en 1970 par Fiat, qui était en train de créer une écurie usine en vue de rivaliser avec Lancia, poursuit Stefano. Associé à Raffaele Pinto qui pilotait une Fiat 124 Spider, il a remporté le prestigieux championnat européen des rallyes en 1972. » Macaluso a ensuite été engagé aux côtés de Maurizio Verini qui pilotait une Fiat 124 Abarth dans le championnat italien des rallyes 1974, puis il a quitté brusquement l' équipe, entre autres parce qu'il avait d' autres centres d' intérêt et des responsabilités fort chronophages. Comme le rappelle Stefano : « Tout juste diplômé d' architecture, mon père commença à travailler pour la société familiale qui était le distributeur italien des montres Omega. Mais il s' intéressa très vite au design et au marketing horloger. Un de ses premiers faits d' armes fut la négociation de l' accord de sponsoring entre les montres Tissot et l' équipe de F1 Lotus de Colin Chapman. » En toute logique, l' étape suivante a été pour Macaluso de lancer son entreprise de distribution de montres en Italie, ce qu' il a fait en 1982 en travaillant avec Breitling, Blancpain ou Hamilton. « Mon père a vraiment compris le potentiel des montres-bracelets mécaniques en Italie. Aussi, ce ne fut pas une vraie surprise lorsqu' il a acheté Girard-Perregaux en 1989, ni lorsqu' il s' est impliqué personnellement dans la conception et la commercialisation de toutes les collections de la marque à partir de ce moment. »

Sous l' égide de Macaluso, Girard-Perregaux n'a cessé d' investir et d' innover avec de multiples brevets, des nouveaux matériaux mais aussi des collections en partenariat avec l' univers automobile, Ferrari en particulier mais aussi avec le Rallye Monte-Carlo ou encore le Tour de France Automobile par Peter Auto. Pendant les vingt ans qui ont précédé son décès inattendu en 2010, Macaluso a été un véritable ambassadeur de l' industrie horlogère suisse, multipliant les initiatives comme la création avec deux partenaires du SIHH qui reste le salon de référence horloger aujourd'hui, mais aussi celles dédiées à la formation de jeunes horlogers. Fort occupé par ses multiples obligations professionnelles, Macaluso s' est mis en tête de retrouver ses anciennes voitures de rallye ce qu' il annonce pour la première fois en 1987 alors qu' il était invité à rejoindre le Club automobile Italia dont il deviendra le président en 2001. Mais ce n' est qu' en 1990 que son mécanicien découvrira par hasard l' automobile qui a sans doute le plus compté dans sa carrière : « Il s' agit de la Fiat-Abarth X1/9 Prototipo qu' il partageait avec Clay Reggazzoni dans sa dernière course, le Giro d' Italia 1974.

« Gino pensait que les voitures étaient le fruit du génie de designers à qui il vouait la même estime qu'à Michel-Ange. »

Cette voiture était très importante pour mon père car il était très impliqué dans son développement, ayant reçu le rôle de chef de projet. Et sa toute dernière course a eu lieu dans cette voiture avec Clay, qui était alors au sommet de sa popularité en tant que pilote de F1 pour Ferrari. » Quand Macaluso découvre la Fiat dans une grange du Piémont, elle est totalement modifiée. Fort heureusement, un spécialiste de voitures de rallye piémontais possède encore le prototype de la carrosserie originale du X1/9. Macaluso achète alors voiture et carrosserie et entreprend une restauration complète qui allait donner le coup d' envoi à sa collection. Et il ne fait pas les choses à moitié comme aime à le rappeler Stefano : « La collection représente l' équivalent de 23 grandes victoires, 44 podiums, 70 000 km de course à travers les 5 continents mais aussi pas moins de 1 400 heures de restauration ! » Créer une fondation dix ans après le décès de Gino a été un geste naturel pour la famille, tant cette collection est au cœur de leur histoire, Stefano va même jusqu' à dire qu' il considère ces automobiles comme ses frères et sœurs. « Cette collection est un excellent moyen pour notre famille de vivre des expériences et de se souvenir de mon père, s' exclame-t-il fièrement. L'idée de poursuivre son travail avec une fondation était celle de sa femme Monica, mais nous travaillons en tant qu' équipe fière et passionnée.

Nous voulons accueillir et assister à autant d' expositions et d' événements que possible et sensibiliser le plus grand nombre de personnes à cette expression ultime de la culture et de la beauté. » Stefano nous précise alors : « Nous voulons éduquer notre public sur l' empreinte sociale et culturelle indélébile de l' automobile, une chose que Gino ressentait avec beaucoup de passion. » Et de poursuivre : « Pendant vingt ans, chez Girard-Perregaux, nous avons formé de jeunes horlogers et la Fondazione Gino Macaluso vise à faire de même avec les jeunes mécaniciens de Turin et d' ailleurs. » Si la fondation souhaite sensibiliser les jeunes à l' importance de la contribution de l' automobile, elle devrait aussi parler aux plus anciens tant elle renferme des mythes automobiles restaurés avec soin ou conservés dans leur jus. « Au cœur de la collection, il y a les voitures de rallye de la période où courait mon père, notamment les Fiat 124 Spider et Fiat Abarth usine qui siègent aux côtés d' icones comme la Lancia Stratos Alitalia et une collection complète de Lancia Martini Racing. La collection s'est aussi enrichie d'autres autos phares comme la Beta Montecarlo et les prototypes d' endurance LC1 et LC2. »

« J'ai une relation particulière avec les voitures, c'est une partie de mon ADN, ainsi que de celui de ma famille. »

Gino Macaluso a alors élargi sa collection à d' autres automobiles de rallye cultes comme la Renault R5 Turbo avec laquelle Jean Ragnotti a remporté le Monte-Carlo en 1981, la Toyota Celica GT4 avec laquelle Carlos Sainz a remporté son premier championnat mais aussi la Mini Cooper S de Timo Mäkinen, qui a gagné les 1000 Lacs en 1967. Stefano précise alors : « Vous avez sans doute vu les célèbres photos de Mäkinen en train de sauter en l' air avec le capot de sa Mini ouvert. C' est cette voiture ! » La passion de Gino Macaluso pour le sport automobile le porte aussi à acquérir une F1, la Ligier JS11/15 avec laquelle Jacques Lafitte gagna le GP d' Allemagne en 1980. Mais comme le rappelle Stefano : « Mon père aimait le sport auto, mais il aimait aussi le design et il a passé des années à chercher les Gran Turismo qui sont les plus importantes dans l' histoire du design. » Et c' est ainsi qu' il élargit le spectre de sa collection vers des Grand Tourisme d' après-guerre comme la Ferrari 275 GTB, l' Aston Martin DB5 ou la Lamborghini Miura sans oublier la Bizzarrini 5300 GT ou une plus récente F40. Si aujourd'hui l'association entre manufactures horlogères et automobiles classiques nous semble quasi naturelle, on le doit en partie à Gino Macaluso qui n' a eu de cesse de cultiver ses deux passions avec la volonté de les transmettre de génération en génération. Et Stefano de rappeler : « Mon père s' est toujours efforcé de former de jeunes horlogers à cet art séculaire mais aussi de restaurer de vieilles voitures, sauvegardant ainsi leur précieuse histoire pour les générations futures. » Quand il s' agit de choisir une auto dans la collection, Stefano est bien embarrassé : « C'est une question tellement difficile... la Bizzarrini est probablement la plus belle, mais la Fiat X1/9 Prototipo est ma préférée parce qu' elle a marqué un tournant dans la vie de mon père. Je n' oublierai jamais d' avoir été assis à ses côtés dans cette voiture en tant que son navigateur à la Targa Florio historique en 1990. C' est très émouvant pour moi de repenser à ce moment. »

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