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Sébastien Charpentier : Mille chevaux dans le cœur

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Sébastien Charpentier : Mille chevaux dans le cœur
© David Marvier
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D'où que l'on vienne il y a toujours un premier. Un premier baiser volé à la belle Adrénaline, un premier tour de roue alors même que les pieds ne touchent pas le sol, une première compétition, un premier succès, échec, fracture… Et puis il y a aussi le premier pilote français à remporter deux titres mondiaux consécutifs en Supersport en 2005 et 2006 tout en ayant auparavant remporté les 24 Heures du Mans moto lors du passage au second millénaire. Le parcours qui mène aux sommets n'est que rarement tracé, voire jamais. Sébastien Charpentier s'est employé à piloter le sien. « Tu sais, quand on était môme, on jouait aux billes avec les copains. On faisait des circuits dans la terre, on tirait la bille et on plaçait nos petites voitures là où elles s'arrêtaient et je disais : “ vous verrez, un jour, je gagnerai les 24 Heures du Mans !”. » Le Charentais alors âgé d'à peine cinq ou six ans ne croira pas si bien dire, à une exception près : cette victoire, il la décrochera sur deux roues et non quatre. Les débuts sont modestes. Petites cylindrées, petites équipes, budgets serrés, mais déjà l'envie de tout donner avec la rage de celui qui veut gagner. Champion de France 50 cc à 16 ans, vainqueur de la CB 500 Cup à 23 en 96. En lieu et place de l'apocalypse informatique promise en l'an 2000, Sébastien remporte les 24 H du Mans avec ses coéquipiers William Costes et Sébastien Gimbert. Il est engagé, fidèle, le constructeur japonais Honda, lui, est de toutes les victoires, un jalon au long cours de son histoire. Pilote professionnel ?

Pilote professionnel ? C'est pleinement mesurer l'opportunité et accepter que le podium n'est jamais à portée de guidon

C'est savoir pleinement mesurer l'opportunité, la chance donnée et accepter que le podium ne soit jamais à portée de volant ou de guidon. Le talent seul ne suffit pas. Les circuits sont autant d'arènes mécaniques dans lesquelles se jette une meute tout aussi affamée de lauriers que vous. La chance, la bonne étoile, le hasard, sont aussi parfois de la partie. À chacun d'y croire, ou pas. Et puis, il y a le risque, le danger, une présence permanente qui peut vous ronger un coin du casque. En 1971, Bruce Brown réalisait le documentaire* nominé aux Oscars On any Sunday et commentait : « La course motocycliste est un monde violent ». Le facteur risque est proportionnel à la vitesse atteinte, à l'angle pris, aux points à arracher dans le Championnat. Dans un contexte compétitif, la chute involontaire, défaillance mécanique, erreur de trajectoire, degré ou kilomètre heure de trop, sera... inévitable. On s'en relève miraculeusement indemne, couvert d'ecchymoses, parfois sérieusement blessé, jamais. Sébastien aura son lot de blessures, se fracturant par deux fois le bassin, mais pas de quoi enterrer l'indéfectible énergie et la motivation qui le définissent. Le palmarès est élogieux et n'a rien d'un unique exploit. Il est le résultat d'un mental en titane, d'une condition physique hors norme, de la complicité et de la confiance d'une marque, d'un dirigeant, d'une équipe. « Ne pas décevoir ou, du moins, essayer de ne jamais rien faire qui puisse engendrer la déception. À l'opposé d'une équipe de sport collectif, sous le casque, tu es tout seul. Ton mental, ton physique et ta machine sont tes seuls atouts car, sur la piste ou dans le vestiaire, tu ne peux pas compter sur un coéquipier pour t'aider, échanger ou te sauver d'une erreur. C'est très dur à vivre mais c'est aussi ce qui m'a endurci, ce qui m'a fait grandir et m'a permis de bien démarrer l'après-course. » Suite et parcours de vie sont propres à chacun. Longtemps après ce premier baiser, lorsque le corps n'est plus à la hauteur de l'exigence, lorsqu'il faut savoir s'arrêter avant le fauteuil roulant ou la boîte en sapin, une décision doit être prise. Une nouvelle direction est à prendre.

Certains divorcent dans le drame, tombent de haut, finissent parfois dans l'anonymat, mal. Sébastien a su anticiper. Créatif aux aguets, communicant, gourmand de la vie, il ne raccroche pas définitivement ; il raccroche différemment. Il a noté q u'a u x États-Unis, les pilotes deviennent ambassadeurs de marques. Pourquoi cela ne pourrait-il pas être le cas dans la vieille Europe ? Il endosse le costume et la fonction pour le premier fabricant mondial, Honda, depuis 2016. Fort de ses succès, de sa notoriété et de son état d'esprit, il rejoint aussi les studios d'Eurosport comme consultant pour commenter entre 2011 et 2018 les courses du MotoGP à la notoriété exponentielle. « J'ai eu aussi la chance de connaître les plus belles heures, les combats les plus dingues de l'ère Valentino Rossi. Ce sont des souvenirs qui marquent, qui restent inoubliables, et je savoure encore pleinement cette période. » Aujourd'hui, il communique activement son image auprès de marques comme Five Gloves, les cuirs RST ou encore l'équipementier et accessoiriste Bihr aux côtés de Johann Zarco et Kenny Foray. L'hyperactif, passant aujourd'hui le plus clair de son temps dans le sud de l'Hexagone, rejoint l'école de pilotage First-on-Track pour laquelle il devient coach sportif et relations publiques. Ce nouveau tournant de carrière est une nouvelle source d'exaltation pour le doublement titré : « Transmettre !? C'est une sensation unique et gratifiante. Déjà parce que j'ai la chance de pouvoir le faire sur mes deux jambes et lorsque nous organisons des sessions avec First-on-Track on ne peut que constater l' émotion, lire la joie dans les yeux des participants. Imagine, avec nous, tu peux venir rouler sur des pistes qui accueillent des étapes du MotoGP ! Nous faisons progresser des passionnés sur des circuits tels que Brno, Jerez, Spa Francorchamps, au Mugello, sur le Bugatti du Mans et d'autres encore en Europe. Il y a des formules adaptées à toutes les envies, à tous les budgets. Tout le monde peut s'inscrire et vivre, un court instant, en toute sécurité grâce à notre partenaire FMA Assurances, cette ambiance propre aux circuits de vitesse. » À l'heure d'un premier bilan, celui de la cinquantaine, Sébastien se retourne et dit avec son sourire malin : « Si je devais tirer un trait aujourd'hui, je serais assez satisfait ! ». Il confie aussi que sa carrière de pilote et sa reconversion lui ont énormément apporté. Pour satisfaire son éternelle nécessité de perfection, chaque décision, chaque projet sont aujourd'hui mûris, réfléchis.

« À l'opposé d'une équipe de sport collectif, sous le casque, tu es seul. Ton mental, ton physique et ta machine sont tes uniques atouts. »

Enfin, il y a l'homme en privé, le 100 % passionné qui nous parle de ses autres univers : la musique, le vin ou encore sa solide collection de baskets. La musique, c'est celle d'inspiration de la rue et des faubourgs new-yorkais : jazz, soul, funk, disco, house. Pour mieux en profiter, il s'est même procuré un équipement unique. Une table de mixage rotative à lampes - les audiophiles apprécieront -, inspirée des célèbres tables Urei. L'objet est fabriqué des mains expertes d'un acousticien français œuvrant chez Électronique & Spectacle. « Ce crossover à lampes est incroyable. Plus il chauffe, plus son rendu est fabuleux et permet d' écouter ou de redécouvrir des morceaux et des albums dans les meilleures conditions » s'amuse-t-il.

« Avec First-on-Track tu peux venir rouler sur des pistes qui accueillent des étapes du MotoGP ! »

Se délectant d'un bon cru, l'épicurien nous laisse en découvrir un peu plus. Dans le salon, une moto trône sous la lumière de la baie vitrée. La #16, sa VTR01 Honda avec laquelle il remporta le second titre mondial mais, ce qui interpelle le plus, c'est que partout où se pose le regard sont disposées çà et là des paires de baskets. « C'est une histoire d'amour qui ne date pas d'hier en ce qui me concerne. Depuis l'adolescence, avant d'aller nous arsouiller au Circuit Carole, j'avais l'habitude de faire une solide session de shopping à Paris. Avec les copains, on allait dénicher les petites boutiques bien branchées, celles qui étaient les seules à faire venir des modèles depuis les US et parfois, des séries ultra-limitées. » La démarche était la même lorsqu'il se rendait au pays de l'Oncle Sam. Au fil des ans, des kilomètres d'asphalte, des trottoirs de Harlem ou de Brooklyn, les chaussures sportives sont acquises, entretenues, conservées. Drôle d'idée de collection penseront la plupart des béotiens.

Cependant, il faut savoir que depuis quelques années s'est créé un véritable marché mondial de la basket. Vintage, séries limitées, collaborations de renom entre marques et sportifs et autres street-artistes affichent aujourd'hui des prix de vente qui en surprendraient plus d'un voire, disons-le, stratosphériques. N'allez pas croire qu'il s'agisse d'un heureux “placement” financier pour le pilote mais l'expression d'une passion bien vivante et toujours active.

Ses yeux pétillent lorsqu'il nous parle de ses visites chez Opium Paris ou de ses premières Air Jordan, Ewing et autres Reebok Pump sorties dans les années 90. Il suivra leur évolution, design, matières, technologies, et ne craint pas de les exposer comme de véritables œuvres fleurant bon la pop-culture. Le temps passe sans que l'on s'en rende compte, Sébastien jette un coup d'œil sur son poignet ceint, là encore, d'un objet qui ne court pas les rues. Cet objet, c'est une montre (voir encadré).

Noire et sobre, elle est le résultat d'une collaboration entre l'horloger Français MAT Watches et Heroes Media, l'éditeur du magazine que vous tenez entre les mains. Juste avant de nous séparer, je lui pose la question des “regrets”. La réponse est sans détour : « À part peut-être celui de ne pas avoir couru en Moto2, le mot regret ne fait pas partie de mon vocabulaire. Je vis de mes passions depuis que je suis né et je continue d'en vivre. En réalité, c'est grâce au mécanisme de l'ouverture au monde et de la passion que je me suis réalisé et c'est aussi ce qui m'a sauvé dans les moments les plus durs. En réfléchissant bien, il ne s'agit que d' équilibre et de respect tout comme le fait d'être entouré de belles personnes, ce qui, entre nous, relève de plus en plus du collector ça aussi… » Le ton est solennel comme s'il ne fallait oublier personne sur l'étagère des souvenirs et des remerciements mais, lorsque l'on a mille chevaux dans le cœur comme Sébastien Charpentier, la liste est assez longue.

* Disponible gratuitement sur YouTube…

« Le mot regret ne fait pas partie de mon vocabulaire. Je vis de mes passions depuis que je suis né et je continue d'en vivre. »

L'heure des héros

Sébastien Charpentier est un épicurien éclairé ayant basé l'essentiel de sa carrière sous la pression du temps et de ses objets de mesure. Collectionneur averti, il apprécie précision et savoir-faire.

C'est à ce double titre justement que Moto Heroes s'est associé au fabricant français de montres Mer-Air-Terre. Son dirigeant, Fabrice Pougez, authentique passionné de moto, a conçu avec un plaisir non feint cette Heroes Watch fabriquée en France et réglée à Paris avec une précision en-deçà des 10 secondes / jour. Cette montre, qui se décale des racines institutionnelles (la première montre officielle du RAID fut produite dès 2005) qui ont fait le succès de la marque, est une déclinaison de la gamme California. Elle possède un boîtier acier anodisé noir de 39 mm et vit au rythme d'un calibre Soprod automatique. Le noir intégral de l'ensemble s'affiche ici en reflets mats et brillants selon la prise de lumière tout comme le noir corvidé ici surligné d'un liseré blanc à 6 heures. Indexes et aiguilles sont luminescents.

Le noir intégral de l'ensemble s'affiche ici en reflets mats et brillants selon la prise de lumière, tout comme le noir corvidé

Esprit motard oblige, le remontoir s'inscrit à 9 heures pour un port confortable sous les gants et intègre des pompes renforcées pour ceux qui voudraient la porter sur le terrain…

Cette Heroes Watch, strictement limitée à 50 exemplaires numérotés, sera officiellement présentée lors des Voiles d'Antibes et sera disponible en vente au prix public de 1 550 € sur heroeshop.fr. Visez d'ores et déjà la pole position si vous souhaitez en acquérir une.

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