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Charles Leclerc : chevalier du ciel

Charles Leclerc a troqué sa combinaison Ferrari pour l’uniforme de l’armée de l’Air. À bord d’un Rafale, il signe un vol supersonique devenu documentaire événement sur Canal+. Par Alexandre Lazerges.

Modifié le Écrit par La Rédaction
Charles Leclerc : chevalier du ciel
Photos Antoine Truchet, Morgane Vallé - Armée de l'Air et de l'Espace et DPPI
Résumé

Charles Leclerc a troqué sa combinaison Ferrari pour celle de pilote de chasse, passant plusieurs jours à s'entraîner et voler à bord d'un Rafale dans un documentaire captivant.

Sommaire
Couverture complète sur mise-en-avant

Leclerc Supersonique, c'est l'essai du pilote Ferrari Charles Leclerc à bord d'un Rafale de l'armée de l'Air, un documentaire de Canal+ multidiffusé et record d'audience en 2024 avec plus d'un million de visionnages. Auto Heroes a voulu raconter le making-of.

Du rouge au vert, Charles Leclerc a changé de couleur en troquant sa combinaison Ferrari pour une version kaki de l'armée de l'Air, le temps d'un essai à bord d'un Rafale filmé par Canal+. Dès les premières images, le téléspectateur est plongé dans l'ambiance.

Des circuits de F1 aux pistes aériennes

Assis dans l'avion derrière le lieutenant de vaisseau Sébastien, Charles Leclerc n'en mène pas large. « Et si l'oxygène s'arrête dans mon masque, il se passe quoi ? » « On le saura très vite, il y a aura une indication d'une panne », le rassure l'instructeur un brin moqueur, avant d'enchaîner : « Mise plein gaz, et c'est parti ! » Exactement comme lors des départs de Grands Prix sur la chaîne payante, il n'y a pas de commentaires. Interrogé, le coréalisateur Julien Fébreau, auteur de la célèbre phrase « rendez-vous au premier virage », explique : « C'est une volonté de notre part, car la qualité des images et les propos des intervenants rendaient les voix off superflues, d'autant qu'Amandine Morhaïm la coréalisatrice a réussi à résumer les principales infos manquantes dans des synthés (ces lignes de textes qui apparaissent à l'écran, NDLR). »

Le résultat s'avère totalement bluffant et tout au long des 26 minutes, on vit le baptême de l'air de Charles Leclerc en Rafale comme si on lui tenait la main. L'idée de rapprocher la Formule 1, discipline reine du sport automobile, et l'avion de chasse ultime des forces françaises tombait sous le sens, mais la réalisation d'un tel documentaire dépendait non seulement de la volonté de l'armée mais surtout de la disponibilité du pilote Ferrari.

« J'avais appris que l'armée de l'Air souhaitait communiquer sur le Rafale et se montrait ouverte aux propositions , explique Julien Fébreau, alors quand j'ai dîné avec Charles Leclerc, le soir du GP d'Australie, j'ai tenté ma chance et je lui ai demandé s'il aimerait voler dans un avion de chasse, il s'est montré immédiatement enthousiaste. J'ai simplement posé une condition, il fallait qu'il soit dispo pour nous pendant 48 heures, ce qui est très long pour un pilote de F1 avec un agenda millimétré. »

Charles Leclerc : chevalier du ciel
Photos Antoine Truchet, Morgane Vallé - Armée de l'Air et de l'Espace et DPPI

C'est là que Charles Leclerc a fait preuve d'une force de persuasion hors norme en parvenant à convaincre le team principal de Ferrari, Frédéric Vasseur, de le libérer en pleine saison juste après le GP de Singapour, afin de profiter de deux missions d'entraînement et des moyens exceptionnels mis à disposition par l'armée de l'Air. C'est ainsi qu'en ce matin du 25 septembre Charles Leclerc atterrit avec son jet personnel sur la piste de la base aérienne 113 de Saint-Dizier en Haute-Marne.

Il est accueilli avec les honneurs par le colonel Emmanuel Auzias qui lui présente les deux pilotes instructeurs, le capitaine Valentin et le lieutenant de vaisseau Sébastien (leurs noms de famille sont secret-défense). Mais avant de monter à bord d'un Rafale, le pilote Ferrari doit d'abord se plier à la visite médicale pour intégrer les missions d'entraînement comprenant un ravitaillement en vol, des manœuvres en basse altitude et le passage en vitesse supersonique. Une fois reconnu comme apte au service, Charles Leclerc doit suivre une formation de sécurité basique avec procédure de déclenchement du siège éjectable et maniement du parachute.

Premier vol en rafale

Moins anxiogène, le passage au simulateur offre enfin des similitudes avec la F1. « Ça ressemble à mon cockpit , dit le vainqueur du GP de Monaco 2024, il y a énormément de boutons et les commandes sont ultrasensibles, c' est assez fun. » L'élève Leclerc assimile très vite, effectue même un tonneau et une boucle (un looping). « Même si c'est virtuel, le simulateur m'a permis de prendre mes marques avant de monter dans l'avion », dit Charles Leclerc. Le réalisateur Julien Fébreau, lui, en est encore tout retourné : « C'est la force d'un athlète de haut niveau comme Charles, il intègre toutes les infos, pose les bonnes questions et peut appliquer les consignes immédiatement, c'est époustouflant. »

Il est temps de passer au vestiaire, et là surprise, les aviateurs lui ont préparé un casque avec le même numéro 16 que sa Ferrari. Mais attention, grosse différence avec la F1 où l'ensemble de la tenue et le casque ne pèsent que 3,5 kg ; pour le Rafale, il faut une combinaison anti-G de 12,8 kg qui se gonfle pour limiter l'accumulation de sang dans les jambes et l'abdomen lors des virages serrés. Une fois harnaché, vers la moitié du documentaire, Charles Leclerc accède enfin au Rafale sur le siège passager, derrière le lieutenant de vaisseau Sébastien. Première impression enthousiaste de Leclerc après une montée franche au-dessus de la Champagne.

« C'est beaucoup plus calme que ce que je pensais », reconnaît-il avant de faire coucou à l'autre Rafale, dans lequel un caméraman de l'armée le filme façon  Gun. C'est le moment d'effectuer un ravitaillement à 30 000 pieds, une mission d'entraînement pour les jeunes pilotes de l'avion de transport A400M. Certes, Charles Leclerc ne peut pas comparer avec les pit stop en F1 proscrits depuis 2010, mais les images embarquées n'en demeurent pas moins impressionnantes, lorsque la perche du Rafale vient s'accoupler avec le cordon qui pendouille de l'aile de l'avion nourrice.

La sensation de piloter est incroyable et les commandes sont hyper réactives, j'ai l'impression d'être dans un jeu vidéo.

Charles Leclerc
Charles Leclerc : chevalier du ciel
Photos Antoine Truchet, Morgane Vallé - Armée de l'Air et de l'Espace et DPPI

En quatre minutes chrono, le Rafale ingurgite 3,3 tonnes de kérosène avant de filer direction le Midi. Charles Leclerc profite alors du voyage pour prendre les commandes, une chance inouïe dont il ne revient pas lui-même : « Je ne pensais pas avoir autant de liberté. La sensation de piloter est incroyable et les commandes sont hyper réactives, j'ai l'impression d'être dans un jeu vidéo. » Il applique à la lettre les consignes de son instructeur jusqu'à ce que la pression soit un peu trop forte : « J'ai un peu chaud, là, je te laisse reprendre les commandes... »

Le temps de se remettre d'aplomb, une nouvelle surprise l'attend lorsque le Rafale survole Monaco. « Oh, je reconnais ma maison d'enfance à côté du golf , s'exclame-t-il tout heureux. Ça donne une perspective nouvelle sur une ville que je connais par cœur» Julien Fébreau, le réalisateur, souligne que par chance la lumière splendide de la fin d'après-midi ajoutait une touche magique à ces images extraordinaires. Problème : à force de longer la côte à basse altitude, et de bouger l'avion dans tous les sens, Charles Leclerc finit par se sentir mal. « OK j arrête », dit l'instructeur avant de mettre le cap vers la base d'Orange, l'étape du soir.

Choc des vitesses

On n'entend rien de spécifique quand on franchit le mur du son, on sent juste la vitesse qui augmente.

Charles Leclerc

Charles Leclerc reconnaît qu'il a la tête qui tourne : « En F1, j'ai des références ultra-proches, là on se sent complètement perdu, j' étais un peu déboussolé. » Après une bonne nuit de sommeil et une séquence d'autographes dédiée au personnel de la base, la mission du deuxième jour consiste à passer le mur du son. Cette fois l'instructeur est le capitaine Valentin avec qui Charles Leclerc doit simuler l'interception d'un avion ennemi en mode supersonique.

Pour ne pas gêner les habitations, ces manœuvres ont lieu au-dessus de la Méditerranée. « À l'intérieur du Rafale on n'entend rien de spécifique quand on franchit le mur du son, on sent juste la vitesse qui augmente », remarque Charles Leclerc. En revanche quand l'avion tourne en virage serré à cette allure, les G se font sentir : d'abord 4, puis 5 et jusqu'à 7, avant de tenter 9 G, mais là le pilote Ferrari tire la sonnette d'alarme : « J'étais en train de perdre la vision » gémit-il. « C'est normal, explique son instructeur, contrairement à la F1 les manœuvres sont beaucoup plus longues. »

À peine remis, c'est au tour de Charles de tenter la manœuvre. Du premier coup il réussit à monter à 8,2 G avant de voler sur le dos comme un pro et même de faire un tonneau. « C'est plus facile quand c'est moi qui contrôle la situation plutôt que quand je subis, c'est un vrai rêve d' enfant, j'ai adoré », jubile-t-il dans son casque. Après un atterrissage en douceur, de retour sur la base de Saint-Dizier, le capitaine Valentin donne son appréciation : « Il a une bonne compréhension de la troisième dimension, et surtout une assimilation super rapide des commandes, bravo. » L'élève Charles Leclerc peut être fier de lui, et en guise de remerciement il offre au colonel de la base une de ses combinaisons de course dédicacée, de couleur rouge évidemment.

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