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Max Verstappen : Un petit chrono dans la tête

Publié le Écrit par La Rédaction
Max Verstappen Photo
© Getty Images /Red Bull Content Pool
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Lorsqu'on lui demande s'il est capable de dire combien de temps il s'est retrouvé derrière un volant, Max répond avec un petit sourire. « Je crois que je n'ai pas envie de savoir ! C'est probablement un très grand nombre d'heures. » On serait tenté de lui souffler qu'il s'agit de mois entiers depuis ses débuts en compétition alors qu'il venait à peine de descendre de sa poussette. « J'ai commencé en kart quand j'avais 4 ans… vraiment je n'ai pas compté les heures et les jours. Je n'en ai pas de trace !

"Je crois que c' est une bonne chose, sinon ce serait effrayant"

Surtout si on ajoute le temps à conduire virtuellement, je passe vraiment un très grand nombre d'heures derrière un volant. » Car lorsque Max Verstappen s'extrait de sa monoplace à la fin d'une séance d'essais ou d'une course, et après en avoir terminé avec ses briefings techniques, il n'est pas rare de voir le champion s'éclipser dans la chambre qui lui est réservée dans l'hospitalité Red Bull ou dans son motor-home personnel sur certains circuits européens pour prendre les commandes d'un simulateur de pilotage. Ainsi, en marge de certains Grands Prix, il peut veiller jusque tard dans la nuit pour participer à une course d'endurance virtuelle en ligne. En mai dernier, le week-end du Grand Prix d'Espagne, Max a remporté une épreuve d'endurance, ce qui l'a emmené jusqu'à trois heures du matin. Ce qui ne l'a pas empêché de gagner le “vrai” Grand Prix l'après-midi suivant. Même dans son jet privé, Max Verstappen garde à portée de mains ses manettes de jeux.

Son équipe a bien essayé de limiter ce manque de sommeil réparateur mais Max a rétorqué qu'il ne voyait pas où était le problème dès lors qu'il continuait à gagner et à dominer la concurrence. Et les habitués des paddocks de F1 savent à quel point ce jeune homme au caractère bien trempé n'a que faire des critiques et des commentaires négatifs (ou positifs) qui ne viennent pas de ses proches. Comment oser, en effet, brimer un pilote qui, au cours de sa carrière - loin d'être terminée -, a déjà remporté les trois derniers Championnats du monde, gagné plus de soixante Grands Prix, décroché quarante pole positions qui sont l'exercice absolu de la lutte contre le temps qui défile, et claqué plus de trente meilleurs tours en course ? (1) Ce petit jeu avec les centièmes de seconde, Max Verstappen l'adore. S'il a souvent une TAG Heuer à son poignet, le partenaire horloger de l'équipe Red Bull, on peut se demander si le Néerlandais n'a pas également un chrono dans le cerveau, tant est grande sa capacité à grignoter un centième de seconde par-là, un dixième de seconde par ici, en pleine conscience. À l'occasion d'un entretien - chronométré lui aussi - il était tentant de lui demander quel est son propre rapport au temps. Lors d'une séance d'essais ou de qualification, les amateurs de Formule 1 ont l'habitude d'être abreuvés d'informations chronométriques sur l'évolution de la performance de chaque pilote. Ainsi, il est possible de savoir en temps réel, secteur par secteur du circuit, si le pilote en action améliore sa performance ou au contraire est en retard. La plupart des pilotes de F1, accaparés par la concentration, souvent en apnée, ne peuvent pas toujours regarder le chrono défiler à l'attaque de chaque virage, il leur faut attendre la fin du tour pour prendre connaissance du résultat qui s'affiche sur l'écran de leur volant. Mais les meilleurs ont un feeling assez sûr. À l'instar de Verstappen, qui a accumulé l'expérience de 200 Grands Prix depuis 2013.

Triple champion du monde, Max est d'ores et déjà considéré comme l'un des plus grands pilotes de l'histoire de la F1. Et il possède cette capacité de savoir où il en est à l'instant T. Ce que le pilote Red Bull a confirmé à Montre Heroes. « Oui, bien sûr, en général on ressent quand on a mieux négocié un virage ou un autre segment du circuit. Mais néanmoins on veut toujours savoir combien. Parce que parfois tu vois que tu as gagné de l'avance et donc tu peux prendre moins de risques au prochain virage ou autre. C'est la raison pour laquelle c'est toujours mieux de savoir le delta de temps sur son écran. » Mais le meilleur pilote reste un être humain qui n'a rien de bionique.

Ainsi, impossible de quantifier, en millième ou centième de seconde, l'amélioration. « Non, mais bien sûr. On l'imagine en tout cas. On se dit qu'on a été plus ou moins rapide. Cela dit ce n'est pas toujours évident sur le moment de le quantifier. » Tout comme l'expérience lui permet de ne pas surestimer sa performance. « C'est vraiment extrêmement rare que je sorte d'un virage en me disant “ça sort super bien” ou “j e m'e n suis bien sorti” et que ce soit une catastrophe. Non, quand je regarde l' écran de contrôle il est rare qu'il ne confirme pas ce que je ressens, qu'il me dise que je suis plus rapide ou plus lent que ce que j'ai ressenti. » Le pilotage d'une F1 est tellement exigeant dans l'exercice extrême d'un tour de qualification, avec une voiture au maximum de son potentiel (pneus neufs et tendres et juste ce qu'il faut d'essence pour une question de poids) qu'il est de toute façon impossible de rattraper dans le virage qui survient une éventuelle imprécision ou faute dans celui qui vient d'être passé. Tout va trop vite comme le décrypte le pilote Red Bull. « Je ne me préoccupe pas de savoir si je gagne ou perds x millisecondes ici ou là. Ça se passe c'est tout. Si je mets un nouveau train de pneus (neufs), là je sens immédiatement que j'ai plus d'adhérence, et donc je peux attaquer d'avantage. Mais c'est difficile à expliquer.

Tous les virages sont différents. Certains permettent de gagner plus de temps que d'autres. » Gagner ou perdre du temps sur un tour est aussi une affaire physique et mathématique.

C'est ce que rappelle l'expert de la vitesse qu'est Verstappen.

« Il y a plus de temps à gagner dans les virages lents que dans les virages rapides, en raison de la très haute vitesse.

On passe moins de temps, dans les virages rapides. Pour gagner vraiment du temps sur un tour, il vaut mieux essayer d'aller plus vite sur des virages plus lents. » Et voilà une idée reçue qui s'écroule, le commun des mortels imaginant que les meilleurs pilotes font la différence dans les courbes les plus rapides. Reste toutefois à ajouter dans l'équation le paramètre machine qui permet, ou pas, ce que le pilote veut faire. « Sur chacun des circuits du Championnat, j'essaie de me battre virage après virage. Chacun est important bien sûr. Ça se passe comme ça et dans cet ordre-là. » Raconté de cette façon, tout paraît si simple. Pourtant, dompter une formule 1 est une affaire de virtuose, qu'elle soit moyenne bonne ou au contraire super performante comme Max Verstappen a la chance d'en piloter depuis plusieurs saisons grâce à Red Bull - Honda qui la prépare et développe. L'inconvénient, très relatif il est vrai, lorsque vous pilotez l'une ou la meilleure des F1, c'est que vous n'avez pas le droit à l'erreur ou de faire des courses médiocres.

De ce côté-là, pas de crainte à avoir avec Verstappen. Il déteste l'a-peu-près

Mais qui est ce génie de pilotage ? Lorsqu'il est question de brosser le portrait d'un pilote de F1, l'histoire est souvent la même. Débuts en karting dès le plus jeune âge puis accès aux formules de promotion (initiation à la monoplace en F4 puis la Formule 3 et enfin la Formule 2) grâce à quelques sponsors ou la fortune familiale. Mais la condition est toujours de gagner, d'être champion, pour être repéré par la filière d'une équipe de Grand Prix. Max Verstappen n'a pas dérogé à cette règle, même s'il a fait l'impasse sur la F2. Un cursus classique, à quelques détails près que voici. Remettons un peu d'ordre dans la biographie du jeune homme. D'abord, il n'est pas vraiment Néerlandais - par son père - car il est né en Belgique, dans le Limbourg. C'est parce que l'automobile club de Belgique ne croyait pas en son talent que cette institution n'a jamais daigné aider le petit Max à ses débuts. Mais en avait-il vraiment besoin ? Son père Jos, un ancien pilote de F1 connu pour ses coups de sang, qui fut le transparent coéquipier de Michael Schumacher, a décidé d'engager son rejeton sous licence néerlandaise en compétition.

Sa mère belge, Sophie Kumpen, qui fut une excellente pilote de karting au niveau international, n'a pas eu son mot à dire. Elle a juste arrêté sa propre carrière de pilote pour assister son fils, avant d'en être séparé un temps après avoir divorcé de son père Jos, accusé de violences conjugales. Avec deux parents ayant évolué à un haut niveau de compétition, il est difficile d'écarter la notion d'atavisme pour expliquer les facilités de Max Verstappen volant en mains, lui qui a toujours évolué dans le milieu de la compétition automobile. Pour beaucoup de passionnés de sport auto, l'enfance du futur champion pourrait ressembler à un rêve. Ce fut souvent le contraire au cœur d'une famille déchirée et surtout aux ordres d'un père intransigeant, au-delà du sévère. Jos “the boss” n'a ainsi jamais toléré la moindre contre-performance du jeune Max dès lors qu'il l'a assis dans un baquet. Ceux qui ont côtoyé l'apprenti champion à l'époque du karting (dont quelques-uns sont également en F1 comme Charles Leclerc, Alex Albon, Esteban Ocon ou Pierre Gasly) se souviennent que le coaching du père était à la limite de la maltraitance.

Ainsi, des témoins racontent que le paternel avait un jour abandonné son fils sur le parking d'une station-service d'autoroute, mécontent de son résultat. Une autre fois, alors que Max ne s'était classé “que” deuxième d'une course importante, Jos ne lui a pas adressé la parole sur le chemin du retour entre le sud de l'Italie et la Hollande. Aujourd'hui, Max Verstappen aime à penser que cet apprentissage à la dure lui a forgé le caractère et a fait de lui le champion sans compromis et dur au mal qu'il est devenu, fort d'un mental inoxydable. Au cœur des batailles les plus âpres, rien ne semble devoir le déstabiliser. Le triple champion du monde, au pilotage agressif, s'est montré aussi ultra-précoce. Soutenu depuis la Formule 3 (en 2014) par Red Bull, il a débarqué en F1 à l'âge de 17 ans pour gagner son premier Grand Prix un an et demi plus tard, devenant ainsi le plus jeune vainqueur de Grand Prix. Depuis, le Néerlandais, tel un métronome, accumule les succès et les records, avec la maturité que magnifie un talent naturel.

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