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Blancpain X Laurent Ballesta : 24 heures chrono

Modifié le Écrit par La Rédaction
Extraites du livre 700 requins dans la nuit 700 requins dans la nuit les photos de Laurent Ballesta sont d'une beauté fascinante, parfois cruelle - Copie
© Laurent Ballesta, Andromède Océanologie, Gombessa Expéditions
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Depuis 2012, année de la première expédition Gombessa, Laurent Ballesta et son équipe lèvent le voile sur d'incroyables mystères sous-marins.

Depuis Gombessa I - Rencontre avec le cœlacanthe, chaque aventure fait progresser la recherche océanographique et produit des images à couper le souffle. Cerise sur le gâteau, elle pose toujours un défi technique en termes de plongée. Ce dernier point n'est pas le moins important des trois : véritable Géo Trouvetou des abysses, Laurent Ballesta ne se contente pas d'un « ça ne marchera jamais ». Des questions, il s'en pose. Et des solutions, il en trouve. En témoigne cette incroyable plongée, qu'il est à ce jour le seul à avoir tentée (et réussie). En 2014, la passe sud de l'atoll de Fakarava (Polynésie française) a été le théâtre d'un exploit sportif et technique, une plongée record de 24 heures à 24 mètres de profondeur. Connue sous le nom de “Mystère mérou”, cette expédition a nécessité une année de préparation et la mise au point d'un protocole de décompression inédit pour… étudier la reproduction des mérous-camouflage. Ces poissons solitaires se retrouvent chaque année au même endroit par dizaines de milliers pour se reproduire lors de la pleine lune de juillet, attirant un nombre considérable de requins. Si le phénomène était connu, personne n'avait pu l'observer. « Je me suis dit qu'il faudrait pouvoir rester longtemps sous l'eau pour être à leur contact. Une plongée de 24 h aurait du sens et on ne risque pas de s'ennuyer quand il y a autant d'animaux ensemble. » Le “mystère mérou” titille une frustration ancienne. Si l'ornithologue peut rester en planque des heures, si le botaniste peut herboriser à loisir, le plongeur est limité par le temps. « À partir du moment où on est sous l'eau le compte à rebours s'enclenche. Que valent nos observations quand on est resté 47 minutes sous l'eau ? La première qualité d'un naturaliste est sa patience et sa capacité à se poser pour regarder autant qu'il le peut. » Pour se donner l'illusion d'allonger le temps, Laurent Ballesta est devenu photographe.

Pour observer toujours plus, il a cherché comment plonger toujours plus profond, toujours plus longtemps. « Je me suis dit : 24 h, 24 mètres… il faut trouver une solution. » Pour éliminer l'azote sous pression emmagasiné dans l'organisme, il faudrait compter 24 h de décompression supplémentaire. Soit 48 h de plongée, ce qui n'est pas possible, même pour Laurent Ballesta. « À un moment il faut dormir, manger… » admet-il, sans s'avouer vaincu pour autant. « J'avais l'intuition que cette règle des 24 h de décompression était empirique. En théorie on pourrait rester dix ou douze heures sous l'eau grâce aux systèmes de recyclage de l'air expiré mais à un moment donné on est rattrapé par notre physiologie. Quand on remonte, le gaz sous pression décompresse et il faut l' évacuer lentement.

Inédite, cette plongée record de 24 heures à 24 mètres de profondeur est une innovation technique.

Cette idée de plongée de 24 h ne fonctionnait pas sur le papier. » Laurent Ballesta va changer de paradigme. C'est auprès d'un expert tunnelier - certains travaillent dans des atmosphères équivalentes à trois fois la pression atmosphérique pour éviter que le front de taille ne s'effondre - qu'il va valider son hypothèse. « La décompression classique est simple : on baisse la pression très doucement. Plus on s'approche de la surface, plus on l'abaisse doucement. Mais il y a une autre façon de faire : au lieu de jouer sur la pression, on joue sur ce que l'on respire en changeant la proportion des gaz. On élimine le gaz sans faire varier la pression, donc il n'y a pas de risque d'accident. J'ai commencé ma décompression bien avant de remonter en changeant les mélanges au cours de mon exploration. » Laurent Ballesta s'est mis à l'eau avec de l'hélium additionné d'oxygène et l'a peu à peu remplacé par de l'azote, qui représente 78 % de l'air en surface. « Je me suis réadapté à l'air extérieur et je n'ai mis que deux heures à sortir de l'eau. Cela n'avait jamais été fait en plongée. » Cette plongée record est également une performance athlétique.

« Je me suis pas mal entraîné » reconnaît le plongeur qui s'astreint à une heure d'exercice par jour et plonge le plus souvent possible dans toutes les conditions. « Il y a la physiologie et il y a le physique. 24 h sans poser les pieds au sol et rester à l'horizontal, cela change la répartition des forces sur les lombaires, on appuie sur le coup de pied et pas sur la plante. » Il faut maintenir l'embout du détendeur dans sa bouche, ne pas se refroidir. Au bout de quelques heures, l'atoll polynésien n'a plus rien de paradisiaque. « 28 °, c'est bien pour se baigner mais au bout de 24 h en maillot de bain on est en hypothermie » constate Laurent Ballesta qui a dû nager non-stop pour « faire tourner la chaudière », dessinant de grands 8 pendant 12 longues heures de jour et autant de nuit. 24 heures sans manger ? Sans dormir ? « Qui n'a jamais fait une nuit blanche ? » rétorque-t-il, balayant la question. Quant à la nourriture, « cela n'a rien de compliqué.

On enlève son embout et on le remet entre deux bouchée s. » Seul inconvénient, ne pas pouvoir respirer en mangeant prive les aliments de leur saveur. Sauf un. « J'ai mangé un morceau de gruyère suisse affiné 24 mois, une merveille, il arrivait à avoir du goût. Le plus important, c'est de boire . Quand je suis sorti de l'eau, j' étais en pleine forme, on a fait la fête toute la soirée. » Malgré la fatigue d'une nuit blanche sous la mer et des palmes trop petites, on est loin de l'image du marathonien qui s'effondre après la ligne d'arrivée. « Cela aurait été un échec.

En plongée, sauf pour un record en apnée, il n'y a pas cette notion d'aller au bout de soi-même. Je voulais démontrer que c'est possible, à condition d'être bien entraîné et d'avoir les bons protocoles pour qu'un maximum de scientifiques puissent le faire. » Ce ne devait pas être aussi simple, puisque personne ne s'est aventuré à reproduire l'expérience. Laurent Ballesta n'est pas homme à laisser les questions qu'il se pose sans réponses. Ambassadeur de Blancpain depuis 2012, il n'avait jamais contribué au développement d'une montre. En 2023, avec la célébration du 70e anniversaire de la première montre de plongée moderne, c'est chose faite. De loin, la Fifty Fathoms 70th Anniversary Act 2 : Tech Gombessa a l'air d'une montre de plongée classique. Ni son diamètre (47 mm) ni sa boîte en titane ne la distinguent. De près, la graduation de la lunette tournante interroge, de même que la présence d'une quatrième aiguille. « C'est parti d'un constat, explique Laurent Ballesta.

La montre de plongée traditionnelle a été dessinée dans les années 50 : la lunette est conçue pour mesurer les minutes de la plongée, soit 60 minutes. » Or les plongées peuvent désormais durer des heures. « On ne sait plus combien de tours a fait l'aiguille. Je me suis demandé comment une montre traditionnelle pourrait mesurer des temps longs facilement.

« J'ai eu l'idée d'ajouter une quatrième aiguille qui ferait le tour du cadran en trois heures. »

J'ai eu l'idée d'ajouter une quatrième aiguille qui ferait le tour du cadran en trois heures. » Marc A. Hayek (Président & CEO de Blancpain, lui-même plongeur) valide l'idée et lance le développement de la montre, y ajoutant des détails fonctionnels au niveau de la lunette, du bracelet et du vernis. « Les fluorescences ne sont pas les mêmes sous l'eau et sur terre, ce qui est très original. Dès qu'on est dans la zone crépusculaire, où il ne reste qu'1 % de la lumière du soleil, la luminescence de la lunette l'emporte sur celle des indications horaires. » Celui qui se rêvait plongeur étant gosse avoue une grande fierté : « Le logo de mes expéditions est gravé sur la masse oscillante. » La Fifty Fathoms est parée pour les plongées modernes. « C'est tout bête mais c'est parti de là » résume-t-il. Encore fallait-il y penser.

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