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Mike Horn : l’homme de glace

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Mike Horn : l’homme de glace
© Sunreef Yachts & DR
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Le tour du monde par l'équateur sans moyen de transport motorisé, la descente du Mont-Blanc en body board, le tour du monde par le cercle polaire, le fleuve Amazone en hydrospeed, des ascensions en plein hiver sans oxygène, la traversée nord-sud de l'Antarctique sans assistance, un tour du monde en voilier, sans oublier des milliers de kilomètres à pied, en vélo ou en pirogue aux quatre coins de la planète, l'interminable liste des exploits signés Mike Horn est sans précédent.

À ses débuts, Mike Horn ne connaissait rien, ou presque, à la pratique de la voile hauturière en solitaire

À 57 ans, le plus célèbre aventurier des temps modernes ne lâche rien dans sa conquête de l'impossible et vient de s'engager dans une nouvelle expédition baptisée “What's left ?” (littéralement : que reste-t-il ?). Objectif : revisiter les zones du monde qui ont marqué ses précédents périples, découvrir des territoires encore inconnus et dresser un bilan de la planète face au dérèglement climatique. À bord du Pangaea, un immense ketch de 35 mètres construit en 2008, l'aventurier sud-africano-suisse a quitté le port de Monaco en mai dernier pour un périple de quatre ans sur toutes les mers du globe. Déjà utilisé à partir de 2008 pour une longue circumnavigation, ce voilier a été fabriqué pour affronter des conditions extrêmes et notamment le froid polaire comme la glace. Avant l'expédition, le Pangaea a été entièrement “refité” au sein du chantier Sunreef à Gdansk en Pologne, partenaire titre du projet environnemental.

Le voilier de 80 tonnes et sa quille relevable ont subi de nombreuses transformations notamment intérieures dans le respect des normes environnementales. Un nouvel éclairage, une meilleure insonorisation ou encore l'ajout de deux cabines doubles pour un meilleur confort au mouillage.

« Je suis parti de Gdansk en avril dernier avec le bateau entièrement rénové pour rejoindre Lorient en France et changer les moteurs et les hélices. Ensuite, nous avons repris la mer pour le départ officiel en mai dernier au Yacht Club de Monaco », détaille Mike Horn. Direction le nord de l'Islande, le Groenland et l'Arctique notamment avant les prémices de l'hiver.

Le bateau, la mer et la voile. Mike Horn découvre cet univers sur le tard grâce à un certain Laurent Bourgnon avec lequel il gagne le Grand Prix des Multicoques comme simple coéquipier en 1997. « C'est vraiment avec lui que tout a commencé pour moi. Il m'a offert l'opportunité d'être sur l'un des voiliers les plus rapides de l' époque, sans rien connaître à ce sport. Laurent avait une philosophie totalement différente des autres skippers, comme Loïck Peyron, qui disputaient les mêmes circuits de régate, explique l'aventurier. Il disait : “Moi je sais naviguer et les autres n'ont pas besoin de connaître la voile, ils doivent juste obéir aux ordres !” Laurent a donc monté une équipe avec des joueurs de rugby, des montagnards ou des aventuriers comme moi qui n' étaient pas du tout des marins mais qui étaient plein d' énergie. » De fil en aiguille, Mike Horn commence à apprécier le large et ses embruns car « sur un bateau tu vas extrêmement vite, cela t'offre beaucoup d'émotions fortes. Puis à un moment, je me suis dit : “Tout ça c'est bien, mais j'aimerais bien aussi savoir barrer un bateau, régler les voiles et pas simplement 'wincher' comme un équipier. ” » En 2000, le projet Latitude zéro voit le jour.

Un incroyable tour du monde par l'équateur (40 000 km) en 17 mois sans moyen de transport motorisé, à la voile mais aussi à vélo, en pirogue et à pied. Mike Horn se met dans l'idée de traverser l'Atlantique, le Pacifique et l'océan Indien avec une embarcation de seulement 28 pieds. « J'en ai parlé à Laurent. Il m'a conseillé alors de choisir un multicoque en l'occurrence en passant par un chantier qui s'appelle Corsair Marine, raconte Mike Horn. C 'est un bateau pliable, tu peux le mettre dans un container, l'envoyer partout et surtout il navigue extrêmement vite, m'a confié Laurent... » Seul hic, le petit multicoque a été étudié pour la navigation côtière et certainement pas pour traverser les océans. « Mike, tu n'es pas plus con que les autres, je pense que tu vas y arriver », lui aurait confié Laurent Bourgnon.

Mais le bateau coûtait très cher, la bagatelle d'environ 80 000 euros de l'époque. « En cherchant des sponsors, tout le monde me disait que j'allais avoir des soucis et que cela n'irait jamais. Laurent aimait répéter : “Si tu vas vite, tu as moins de problèmes, c'est un bateau que tu peux renforcer, il te faut une embarcation solide”. Un homme fortuné a pris connaissance de mon projet Latitude Zéro en lisant les journaux. Il m'a contacté, on a déjeuné ensemble à Lausanne et il m'a demandé combien il me fallait pour le petit trimaran. Je lui ai parlé de 100 000 euros. Une heure plus tard le téléphone sonne, il me donne rendez-vous et revient au volant de son Range Rover avec cette somme en monnaie trébuchante dans un petit sac en papier. C'est comme cela que je suis devenu marin. Juste par chance », détaille l'aventurier sud-africano-suisse qui finira par traverser l'Atlantique sur l'immense voilier Mari Cha III en 1997 ou effectuer beaucoup plus tard des navigations au long cours comme celle en 2008 baptisée Pangaea, du nom de son voilier en aluminium construit dans une favela de São Paulo au Brésil.

« Mike, tu n'es pas plus con que les autres, je pense que tu vas y arriver », lui aurait confié le regretté Laurent Bourgnon

À ses tout débuts, Mike Horn ne connaissait toujours rien (ou presque) à la pratique de la voile hauturière en solitaire. « La première fois, quand je me suis retrouvé tout seul à barrer un bateau c' était pour la traversée de l'Atlantique que j'ai réalisée en quatorze jours, détaille-t-il. Je ne maîtrisais pas le réglage des voiles car pendant les régates on ne naviguait jamais en mode tempête ou dans des énormes vagues. Comme je pratiquais le parapente, j'ai reproduit les mêmes techniques pour obtenir la meilleure pénétration dans l'air. J'ai également lu des bouquins pour choisir le cap idéal en fonction de l'angle du vent. Grâce à mon téléphone Iridium, je pouvais appeler Laurent Bourgnon ou encore le skipper suisse Stève Ravussin qui a beaucoup navigué avec Franck Cammas, lui aussi devenu un ami. À distance, je pouvais communiquer avec les meilleurs marins du moment, ils me faisaient part de leur expérience. » Après la traversée de l'Atlantique, l'aventurier s'attaquera au Pacifique et collectionnera les milles. « Quand tu as plus d'expérience en mer, tu gagnes en confiance. Gentiment, tu apprends à naviguer de cette façon », confie l'ex-animateur de The Island sur M6.

Sa rencontre avec l'équipe de Sunreef Yachts, le partenaire de l'expédition actuelle “What's Left”, remonte aussi aux années 2000 en lien avec l'histoire du regretté skipper suisse. « Quand il a arrêté avec son partenaire Primagaz, Laurent Bourgnon voulait construire pour The Race, en 2000, un énorme catamaran de course pour disputer ce tour du monde. Mais ce projet n'a jamais totalement abouti. Il a entamé la construction des flotteurs mais il manquait beaucoup d'argent pour finir son multicoque, raconte Mike Horn. Un moment, Laurent en a eu marre de chercher des sponsors et d'être tout le temps financièrement à sec. Il m'a confié vouloir construire un catamaran sans mât, à moteur, pour aller aux îles Fidji. Il voulait plonger et faire des journées de charter pour gagner sa vie. .. Et puis l'idée de le faire construire en Pologne est arrivée. En Pologne ? Mais on construit des bateaux là-bas ? Oui m'a répondu Laurent. Il y a un Français qui s'appelle Francis Lapp (NDLR : le fondateur et PDG actuel de Sunreef Yachts) , il innove et a plein d'idées ! »

Laurent Bourgnon rencontre l'entrepreneur tricolore et signe la fabrication d'un catamaran à moteur de 70 pieds qui lui permettra de parcourir la planète bleue. « Grâce à Laurent, je me suis intéressé à la construction des bateaux et j'ai fait la connaissance de Francis Lapp. Un homme dont j'apprécie la vision des choses et les connaissances énormes en termes de nautisme. Francis est allé chercher des experts qui savent naviguer et connaissent le fonctionnement d'un bateau », complète Mike. Avec “What's left ?”, Mike Horn reprend la mer pour une nouvelle expédition de quatre ans autour du monde. « Le but est, on peut le dire, très égoïste !, reconnaît-il. À 57 ans, j'éprouve encore le besoin de réaliser de nouvelles choses et de visiter des parties du monde où on ne pouvait encore aller auparavant. Mais également de repasser par des endroits que j'ai découverts il y a fort longtemps et d' établir des comparaisons avec l' état climatique actuel. .. En trente ans, j'ai eu la chance de pouvoir stocker des millions de photos et du coup, je peux, par exemple, rapprocher la jungle d'aujourd'hui avec celle d'il y a trente ans. Je vois l'impact de la pollution et des changements climatiques que notre planète a dû absorber le temps d'une vie d'exploration… Je reviens du Groenland que j'ai traversé il y a plus de vingt ans. À l'époque, je me souviens encore d'une langue de glace qui brillait juste après la traversée du Groenland. J'ai conservé une photo de l'époque, je me vois au bout du glacier. L'été dernier, je suis retourné au même endroit, à la même position. Il n'y a plus de glace, que de la terre, il n'y a plus rien ! Le glacier est situé maintenant à plus de 30 0 mètres. Cela m'a choqué ! Je ne dis pas qu'il faut faire systématiquement peur aux gens mais nous devons être conscients de ce qui se passe dans notre vie de tous les jours. C'est pour cette raison que j'ai appelé cette expédition “What's Left ?”. Ce qu'il reste de ce que j'ai vu il y a 30 ans, ce qu'il reste aussi à faire pour moi comme exploration, en tant qu'aventurier... »

Cette expédition au long cours emmènera Mike et son équipe sur toutes les mers du globe, entre l'Arctique, la jungle amazonienne, l'Antarctique, la Patagonie, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le nord du Canada, l'Alaska ou encore des zones préservées en Asie.

L'explorateur prévoit plusieurs escales d'une durée de six mois dans chaque destination en fonction des conditions météo. Puis l'appel du large reprendra ses droits. « À bord d'un bateau amarré, tu n'es pas libre. Quand tu largues les amarres, tu laisses une partie de tes problèmes à quai et tout ce qui peut peser dans notre société actuelle. La liberté en mer, c'est ce que je préfère ! », conclut notre explorateur.

Mike Horn & Panerai

Ambassadeur de la marque horlogère depuis près de 20 ans, Mike Horn collabore à la sortie d'une montre en édition limitée à seulement 500 exemplaires.

La Panerai Submersible Chrono Flyback édition Mike Horn PAM01291 en titane brossé de 47 mm est étanche à 300 mètres et disponible avec un cadran bleu bicompax et des détails jaunes.

Prix : 19 900 euros

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