S'abonner

Pascal Duclos – Pinbal : une boule de flipper

Modifié le Écrit par La Rédaction
Pascal Duclos – Pinbal : une boule de flipper
© Marc de Tienda
Couverture complète sur mise-en-avant

Un rendez-vous au lever du jour sur le bassin, rien de plus normal quand Pascal Duclos vous attend. À dix ans, il dormait déjà sur le bateau de son grand-père René, un modèle in-board basé à la Teste-de-Buch en Gironde. Comment planter les bonnes habitudes... Le soleil révèle le quai Gostar avec ses concessions de bateau, la moiteur iodée de l'été est déjà présente. Pascal attend avec ses collaborateurs et de quoi déjeuner avant de partir naviguer. Au milieu de ses bateaux fétiches, ses Pinball hybrides. Le nom de baptême ? Inutile de chercher bien loin, l'homme au physique de rugbyman est fan de flipper, et certains sont à domicile, au milieu du bureau. Tout le monde a joué au flipper. Jeune ou vieux, cette machine récréative est abordable par tous, une pièce suffisant à l'animer et l'ingénierie qui claque comme une bonne et lumineuse idée, c'est un tout petit résumé du bonhomme. Pour faire tenir Pascal dans une entreprise, il faut vraiment que son esprit créatif puisse fonctionner à pleines turbines. Ingénieur recherche chez Schneider avec des moyens, de quoi s'occuper dans bien des secteurs et de jolis brevets, qui aurait pu dire qu'il prendrait le large au... sud de la Seine ? Mais la vie parisienne l'a remis sur les rails d'une entreprise plus petite, offrant une liberté d'évolution, une fraternité avec associé et collègues, et un espace ouvert pour ses réflexions technologiques.

En revenant sur le bassin, le créateur de Pinball savoure le mariage entre ses rêves d'enfant et sa réussite industrielle

Et donc en 1996, il se retrouve chez Goupil, qui avec une certaine intelligence situationnelle se place sur un marché qui intéressait peu d'industriels à l'époque, le véhicule utilitaire “électrique”. Les critères d'utilité, de facilité et de frugalité sont dans ses cahiers des charges. Thierry Zerbato et Pascal Duclos avaient du culot avec leur production de véhicules 100 % électriques, des idées affirmées de développement durable, tout en sachant que les routes de l'innovation sont parfois pentues et longues. Les deux hommes préférant investir d'abord dans l'humain, les débuts se font sur juste 1 800 m2 à Aiguillon avant de se retrouver dans plus de 6 000 en 2009 et sur trois sites. Au bout de leur aventure, 1 200 véhicules sont produits avec 100 personnes, 25 millions de chiffre d'affaires dont 40 % à l'export. Un gros mondial s'intéresse à “l'utilitaire rusé” et après quinze ans d'aventure, les deux compères vendent à Polaris. Des envies de grand large reprennent Pascal, notre ingénieur retrouve Arcachon.

Le goût du risque, l'envie de créer, l'assurance de ceux qui ont déjà réussi des projets différents, tous ces sentiments emmènent notre furieux ingénieur sur un nouveau cap, et pas seulement celui du Ferret. En échangeant avec Fabrice Dufour, le célèbre fondateur des bateaux Beacher, le voilà en pleine réflexion sur une création nautique, en symbiose avec son temps. Pour Pascal, « frugalité, simplicité, facilité d'utilisation, ce sont toujours des paramètres dont j'essaie de ne pas m' éloigner. » Le bassin d'Arcachon est un excellent site pour mettre au point un bateau de plaisance. Des marées, des fonds variables, peu d'emplacements au port. Pas question de partir dans les nuages, même si son job rejoint la passion. « Il faut créer malin, dans des domaines où peu de chantiers osent aller, être différent », dixit notre adepte de l'électricité. Une petite structure voit le jour en 2015, dans laquelle tout le monde se connaît, où les décisions se font vite, sans pyramide hiérarchique vaporeuse. « Dans mes PME de croissance, je peux voir et tester les innovations à un rythme que les grosses structures ne se permettent pas. »

Pour le coup Pascal, après les grandes routes industrielles, se retrouve libre de tout faire, de tout assumer. « J'ai le premier pied dans le bureau d' étude, le choix du premier client, les premières décisions. » Pour le premier client, rien n'est plus important dixit le boss. Créant un concept de bateau, même si la technologie est dans l'air du temps, le propriétaire doit adhérer au projet et finaliser en quelque sorte sa validité.

« C'est primordial, d'autant que l'hybride en bateau, c'est tout neuf. D'après mes commerciaux, bien des clients se réjouiraient de naviguer en cata hybride et au final peu franchissent le pas. Pour l'instant. » Le Pinball que ce soit sur l'eau ou à quai est un vrai bateau, bien né avec plein de petites astuces reflétant l'activité bouillonnante de Pascal Duclos. Au sec, le regard est attiré par deux tuyères latérales, dans lesquelles se nichent deux arbres d'hélices, on ne peut plus à l'abri de tout danger extérieur.

« Il faut savoir aller sur des terrains délaissés par les autres. Le challenge technologique est énergisant pour les ingénieurs créatifs. »

Chaque coque du catamaran a son moteur électrique. Les deux tuyères servent à virevolter tranquillement au port, l'inversion de la propulsion donne un effet similaire au propulseur d'étrave classique. Démo matérialisée en direct avec le boss à la barre. « En fait, il n'y a pas deux mais trois moteurs électriques, le troisième, le Regen, étant accouplé à l'in-board Zdrive. Le Regen sert à recharger les batteries. Tout comme pour ses Goupil, pas besoin de se lester avec des batteries surdimensionnées pour l'usage. Dans cette configuration, on a de quoi sortir du port et cruiser sur des zones peu profondes entre 4 et 5 nœuds avec une autonomie de 2 h et de 1 h 15. » La bonne idée, c'est de relever le Zdrive en mode électrique et de “beacher” sans risque pour les hélices protégées dans les tuyères. « Pas de risque de se blesser en baignade ou en jouant sur ou hors du bateau », l'ingénieur ayant conçu son Pinball comme base nautique, sachant que les plaisanciers sont parfois de “grands enfants” sans soucis. De la place, il y en a sur son flipper : 20 m2 pour emmener de quoi s'occuper, paddle, kayak ou surfs. Bien sûr, il y a un gonfleur au cas où. Bien sûr, il y a une plancha, un réfrigérateur, des bacs, de quoi dormir (une cabine igloo, se déployant en appuyant sur un bouton). Bien sûr, bien sûr... L'ingénieur a déployé plein d'astuces pour son esprit du nautisme pour quinze personnes à embarquer à son bord. Une fois rassasié ou à la fin du week-end, le Pinball reprend ses fonctions de bateau naviguant. Le capitaine Duclos se charge de nous présenter le poste de pilotage qu'il a voulu accessible à tous. Les commandes essentielles sont “sécures” même pour un daltonien. Un écran se charge de vous résumer le fonctionnement du bateau.

« Deux boutons et la barre suffisent. Pour repartir tranquille à l' électrique le bouton bleu, et dès qu'il faut accélérer au-delà des 5 nœuds, on appuie sur le jaune pour passer en thermique. Très vite, mes deux turbines latérales se vident et hop, le Pinball est un cata normal. » Dit comme cela, tout paraît évident. Le Pinball file ses 25 nœuds tranquille, s'appuyant sur ses 350 chevaux, suffisants pour les 9 mètres et les 3,8 tonnes à déplacer. Chez Pinball, pas de surenchère de puissance en thermique ou en électrique. Comme en aéronautique, Pascal fait ses choix pour assurer les performances et les qualités recherchées. Ni trop, ni trop peu. La philosophie du chantier est ainsi : efficacité, frugalité, raison. L'innovation n'est jamais loin, Pascal Duclos s'en délecte. « J'ai travaillé sur des algorithmes de pilotage pour que n'importe quel utilisateur se retrouve comme s'il conduisait un véhicule terrestre. » À ce stade pour suivre le boss dans ses réflexions... comment dire ?

« J'ai travaillé sur des algorithmes de pilotage pour que n'importe quel marin puisse se débrouiller. »

Il est préférable de repartir sur des plaisirs simples, comme juste savourer la joie de barrer. Mounir Al Aouni, son bras droit, remarque avec malice que je suis un peu perdu techniquement, lui qui est tout habitué aux élans passionnés de Pascal. Pour produire ses bateaux, Pinball a relancé depuis 2020 le chantier Ocqueteau sur l'île d'Oléron, en toute rationalité. Une histoire maritime de 70 ans est des plus rassurantes pour lancer ces catamarans et même une gamme de bateaux de pêche, les Ostrea. L'homme d'entreprises n'est pas dans l'emphase nombriliste. Il sait analyser s'il réussit, s'il concrétise ses rêves. À ses côtés, un magnétisme positif porte un groupe de personnes sur une même route, le tout dans une ambiance assez familiale, avec un ingénieur arborant une joie de vivre flagrante. De quoi “claquer” une partie gagnante avec le Pinball hybride.

Mentionnés dans cet article

Écrit par La Rédaction
Partagez cet article partout

Dernières news sur mise-en-avant

Bugatti 57G "tank" : voyage dans le Tank

Bugatti 57G "tank" : voyage dans le Tank

Dans le vaste kaléidoscope des Bugatti Type 57, celle que l'on surnomme le Tank détonne avec son dessin à part, ses records du monde et son palmarès incroyable, couronné par une victoire aux 24 Heures du Mans. Par Étienne Raynaud.

Du côté de Lille : chti'time 

Du côté de Lille : chti'time 

Petit tour de cadran dans la capitale des Flandres. Même si l'on n'y crée pas de montres, horlogers, amateurs et collectionneurs trouvent toujours de quoi se réchauffer le cœur sous un ciel bas de légende. Alors, haut les chronographes ! De notre envoyé spécial Jean-Pascal Grosso.

Nicolas Casano : pêche en “no kill”

Nicolas Casano : pêche en “no kill”

La pêche au “broumé”. C'est de cette technique ancestrale de sa région que l'Héraultais, champion de France en titre de pêche au thon, est passé maître. Il nous a conviés pour une petite démonstration, prêt à batailler avec ce poisson qu'il qualifie de “divin”. Par Philippe Leblond.

Road burner garage : agent double

Road burner garage : agent double

Road Burner Garage manie toujours l'art de la préparation avec élégance. Lorsque l'inspiration vient de la DB5 de James Bond, on parle alors de majesté. Par Jean-François Muguet.

Auto union Schnellsportwagen : formule 1 berline

Auto union Schnellsportwagen : formule 1 berline

Le département “Tradition” d'Audi a eu l'excellente idée de donner vie à un projet délirant que les ingénieurs de Porsche avaient esquissé il y a 90 ans… mais qu'ils n'avaient jamais pu concrétiser. Ils voulaient tout simplement mettre sur la route la machine la plus démoniaque jamais imaginée. Par Serge Bellu.

Philippe Bas : bonne gueule, bonne heure

Philippe Bas : bonne gueule, bonne heure

Philippe Bas, acteur à succès, prend une pause pour se recentrer, évoquant sa passion pour les montres liées à ses rôles et son amour du sport et de la vie simple. Par Jean-Pascal Grosso.

Couverture complète sur mise-en-avant >

Sur le même sujet

Nicolas Casano : pêche en “no kill”

Nicolas Casano : pêche en “no kill”

La pêche au “broumé”. C'est de cette technique ancestrale de sa région que l'Héraultais, champion de France en titre de pêche au thon, est passé maître. Il nous a conviés pour une petite démonstration, prêt à batailler avec ce poisson qu'il qualifie de “divin”. Par Philippe Leblond.

Tim Darni : esprit mini, ambition maxi

Tim Darni : esprit mini, ambition maxi

Entrepreneur, skipper et maintenant constructeur. À tout juste trente ans, Tim Darni affiche un parcours déjà riche. Pour une prochaine transat en solitaire, il construit un prototype à son image : performant et cohérent. Par François Tregouët.

Ultim sailing : duo ultime

Ultim sailing : duo ultime

Imaginer et construire des événements autour de la voile et de la course au large, c'est le quotidien d'Emmanuel Bachellerie et de Mathieu Sarrot réunis au sein de leur entreprise Ultim Sailing qui organise notamment le Tour Voile ou les 24H Ultim. Par Geoffroy Langlade.

Esteban Ocon : une part de bateau

Esteban Ocon : une part de bateau

Meros, le spécialiste du “yacht-sharing”, a choisi le pilote de F1 Esteban Ocon comme ambassadeur officiel pour mettre en lumière ses activités et son nouveau Sunseeker 95. Par Geoffroy Langlade.

Nicolas Gilles : en haut de l'affiche

Nicolas Gilles : en haut de l'affiche

Fondateur de l'agence rennaise Désigne, Nicolas Gilles fait partie des designers les plus en vogue dans le milieu de la voile mais pas uniquement. Il a ainsi signé l'identité visuelle de nombreux événements sportifs dont le Vendée Globe ou le Spi Ouest-France, mais aussi celle des mythiques 24 Heures du Mans. Par Servane Dorléans.

Tom Chiappe - E1 series : need for speed

Tom Chiappe - E1 series : need for speed

Baigné dans la compétition motonautique depuis son plus jeune âge avec un père plusieurs fois champion du monde de F1, Tom Chiappe dispute cette saison le circuit E1 Series des bateaux électriques au sein du Team Rafa, l'écurie du tennisman Rafael Nadal. Portrait à toute vitesse ! Par Geoffroy Langlade et Fernando Patrese.