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Alfredo Häberli : la DiaStar sur un Rado

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Alfredo Häberli : la DiaStar sur un Rado
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Avant toute chose, écoutez Adrian Bosshard, le président de Rado : « Pour l'anniversaire de notre DiaStar Original, nous voulions collaborer avec un designer industriel, épris d'horlogerie. Il devait s'inscrire en adéquation avec nos valeurs, la pérennité notamment. » La marque, propriété du Swatch Group, dispose de spécialistes en interne mais elle fait régulièrement appel à des intervenants extérieurs. La démarche est intéressante. Les stylistes qui relèvent ces défis sont, pour la plupart, des novices en horlogerie. Ils se retrouvent confrontés à un objet mécanique minuscule qu'ils doivent maîtriser puis transcender. Pour y parvenir, ils font souvent des choix originaux ou innovants. In fine, leur regard donne naissance à des pièces parfois admirables que l'on s'arrache et, d'autres fois, à des montres plus conceptuelles, qui se révèlent moins faciles à porter ou à vendre. En 2009, le Britannique Jasper Morrison imagine ainsi l'élégante r5.5 Automatic au boîtier carré à coins arrondis. En 2016, c'est l'Allemand Konstantin Grcic qui rhabille la Ceramica. Un an plus tard, la True s'offre une salve de six nouveaux designers dont Rainer Mutsch, Oskar Zieta ou le trio Big Game. Nouvelle collab en 2020 pour la True Square, cette fois. La marque demande à cinq équipes de designers internationaux de donner leur vision de cette montre. Un Chinois, Yuan Youmin, un duo japonais Yoy, un duo d'Indiens Jiten Thurkal et Sumir Tagra se penchent sur cette montre de forme.

Notre préférée est sans conteste celle du Britannique Tej Chauhan qui fait un carton. Formes fluides et céramique jaune, cette version emporte vers un futur pop. Plus conceptuelle, celle des Italiens de FormaFantasma se révèle délicate à lire. Un an plus tard, Li Edelkoort, papesse de la mode et des tendances, rhabille la True Thinline. La montre intégralement blanche s'avère vraiment stylée. In fine, ces collabs entre Rado et les designers font du bien.

Ce designer possède cette identité suisse et cette forme de poésie dont nous avions envie. » Adrian Bosshard

Modernes, singulières et poétiques, les montres créées sont de vrais petits ovnis horlogers. La DiaStar, dont le nom vient de Dia pour diamant et de Star pour vedette, est la montre étalon de Rado ; celle qui embarque l'ADN original de la marque. Elle fête cette année ses 60 ans et le choix de la direction se porte sur Alfredo Häberli pour la redessiner. Né à Buenos Aires en 1967, ce dernier arrive en Suisse avec ses parents en 1980 et tous trois s'installent à Zurich. En 1991, il y ouvre son studio de design - Alfredo Häberli Design Development. Il se spécialise dans la conception d'objets d'art de la table et de meubles. Il a travaillé pour BMW, Georg Jensen, Alias, Moroso, Vitra ou Camper. Il s'est aussi frotté à l'architecture. C'est Christian Verdon, directeur recherche & développement de Rado, qui découvre Alfredo Häberli. « Ce designer possède cette identité suisse et cette forme de poésie dont nous avions envie », se félicite Adrian Bosshard. Christian Verdon le contacte.

Il s'en souvient : « Je lui dis alors que nous cherchons quelqu'un capable de retravailler la montre DiaStar mais sans la dénaturer pour qu'elle conserve la totalité de ses codes génétiques ». Le designer accepte le défi, ravi. Il rêvait de réaliser une montre depuis longtemps. Il voue en effet une véritable fascination pour ces petits objets animés.

Cet attrait débute le jour de ses 18 ans. Son père lui offre le garde-temps que son propre père lui avait légué au même âge. « Aujourd'hui, je possède une collection de 60 montres, surtout des modèles de la fin des années 60 et du début des années 70. Ils sont très importants pour moi. J'en change tous les jours. Quand je voyage, j'en emporte toujours au moins deux avec moi, que j'associe à mes tenues », déclare le designer. Alfredo Häberli est un homme élégant, un dandy. Ce quinquagénaire chic porte une courte barbe blanche et de grosses lunettes noires qui s'assortissent à ses cheveux poivre et sel. Le designer-esthète s'habille avec style. Il porte notamment des vestes de travail aux coloris inattendus, bleu ciel le jour de notre rencontre. Enfin, pour parachever son look, il se déplace en Porsche 911 vintage, un modèle des années 80, beige, en parfait état de conservation. Quand Alfredo Häberli parle, sa voix chaleureuse se fait captivante. Il manie les traits d'humour. En grand séducteur, il sait qu'un auditoire qui rit est à demi conquis. « Je suis un concentré de précision helvète et d' émotivité latine », se définit-il lui-même. Pour Rado, la mission consiste donc à relooker la DiaStar qui fête ses 60 ans en 2022. Pas si facile. Cette montre a une forte personnalité. Elle reçoit notamment une originale coiffe ovoïde en Céramos, une céramique de métal high-tech qui lui donne sa forme elliptique inhabituelle aujourd'hui. Les montres de ce type étaient beaucoup plus courantes en 1962 quand naquit la DiaStar. Enfin, son boîtier utilise le “métal dur”, un matériau cinq fois plus résistant que l'acier. En gros, cette avant-gardiste ne craint pas trop les rayures. Le cahier des charges, présenté au designer, apparaît un brin paradoxal. « Les gens de Rado me disent : “nous voulons une nouvelle DiaStar Original mais il ne faut surtout rien changer à la montre originelle” », se souvient-il. Le designer étudie alors l'objet, sa composition, sa géométrie sous toutes ses coutures et ses différentes versions depuis les années 60. « L 'originale est de style vintage, sixties. Mais je ne voulais pas réaliser un rétro-design. Je voulais une montre d'aujourd'hui », indique Alfredo Häberli.

Il s'interroge alors sur ce qu'il peut modifier. Quels détails il se sent le droit de faire évoluer. « J'ai beaucoup dialogué avec l' équipe Rado, ajoute-t-il. Puis tout est allé très vite. » En 10 jours, la DiaStar Original 60-Year Anniversary voit le jour : il choisit d'épurer la boîte et son fond. L'ancre Rado passe du rouge au blanc, il réduit le logo et habille la coiffe en Céramos d'une finition soleillée. In fine, cette DiaStar Anniversary est plus fine, plus élégante. Enfin, le cadran de type “sandwich” est recouvert par une très singulière glace taillée à 6 pans qui partage cet élément selon la lumière. « Quand je l'ai reçue, j' étais vraiment très heureux et fort ému », se souvient le designer. À suivre. MH

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