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Antoine de Macedo : Docteur Tourbillon

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Antoine de Macedo : Docteur Tourbillon
© Götz Göppert
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Le marché de la montre de collection explose, la spéculation horlogère est reine et, avec elle, les acteurs du milieu se multiplient comme des petits pains. En marge de cette effervescence, il y a Antoine de Macedo. Calme, la voix douce et posée, souriant mais jamais trop. Enfant du quartz, horloger de formation, il a fait de la montre de collection son métier. À sa façon, en gardant la tête froide et l'esprit ouvert. C'est dans son écrin du 28 rue Madame - dans le très chic VIe arrondissement parisien - qu'Antoine de Macedo reçoit. Nous n'avons pas encore franchi la porte de ce haut lieu de la montre de collection que les surprises commencent. Dans les vitrines ? De magnifiques tocantes bien entendu, mais pas que. Antoine de Macedo adore chiner, on devrait même dire qu'il accumule au point d'avoir réuni une incroyable collection d'objets vintage liés à l'horlogerie. Ainsi, lampadaires-horloges, mappemondes, pendules et même un aquarium décoré de montres de plongée peuplent son antre, où paradent une Ellipse d'Or de Patek Philippe, une Breitling Navitimer des années 50 ou encore une Rolex Daytona cadran noir… Une fois à l'intérieur, la boutique ressemble plus à celle d'un antiquaire ou d'un décorateur qu'à celle d'un horloger.

Un moyen merveilleux de mettre en majesté l'ensemble de ses belles mécaniques, autant de montres recherchées par les fans de vintage, les collectionneurs en herbe ou les spéculateurs les plus stratèges. Des centaines de pièces disposées dans des vitrines anciennes qui nous renvoient dans les années 50. Après avoir emprunté un escalier dissimulé, nous interrompons Antoine de Macedo dans sa pause-café afin de découvrir son histoire. Naïvement, nous pensons débuter notre échange en parlant de montres, eh bien pas du tout ! Il active son iPad et farfouille dans son dossier photos. « Regardez ce que je viens de m'acheter Un » Tourbillon, une Répétition Minutes, une Patek Philippe Unique ? Non ! Il nous montre de superbes photos d'un vignoble de la région du Dão au Portugal, à Santare, son village natal. « J'ai toujours eu envie de faire du vin, mon père en a toujours fait à titre personnel, moi j'avais besoin de me lancer de façon entrepreneuriale. C' était le moment ou jamais, c'est une question d'horloge biologique. J'ai 54 ans, je peux encore mener à terme un nouveau projet mais ça risque de ne pas durer. » Le projet est vaste ! La création de deux cuvées, rouge et blanc, la restauration du manoir du XVIIIe siècle pour ses vieux jours, la création d'appartements d'hôtes dans les communs et certainement d'un garage pour quelques voitures de collection, une autre de ses passions : « J'aime les autos mais je n'aime pas les conduire », lâche-t-il dans un sourire.

Antoine de Macedo a fait de sa passion son métier. Un homme comblé qui garde la tête froide

Antoine de Macedo a fait son chemin et profite aujourd'hui des fruits de sa carrière exemplaire, du métier que son père a choisi pour lui. « En bonne Portugaise, ma mère était femme de ménage. Elle travaillait chez un horloger et c'est mon père qui m'a mis à l'âge de 9 ans en apprentissage là-bas. J'y ai appris beaucoup et la bonne idée de mes parents a été de m'envoyer à Morteau dans le Doubs pour passer mon CAP d'horloger. Je ne suis pas un homme d'affaires, je suis un vrai horloger. » À 17 ans, CAP en poche, il se lance et multiplie les expériences dans des centres techniques. Nous sommes dans les années 80, c'est la folie du quartz, et pourtant, le jeune Antoine de Macedo est très attiré par la mécanique. Au point d'ouvrir quatre ans plus tard - il n'a que 21 ans - son propre atelier-boutique à Paris, rue Vieille-du-Temple. Sa belle aventure débute ainsi, dans le Marais, lieu historique des fournituristes horlogers parisiens. Là-bas, il vend et répare des montres de plus en plus belles et rares. « Du jour au lendemain je me suis jeté dans le business de l'horlogerie ancienne », dit-il. « Je ressentais à cette époque une sensation bizarre. Sans être vraiment sûr de moi, j'avais l'impression d'avoir toujours fait ça. » L'époque est propice, le renouveau de l'horlogerie mécanique est pressenti, les manufactures sortent la tête de l'eau, l'eldorado de la montre de collection est annoncé. Antoine de Macedo débarque dans le VIe arrondissement de Paris en 1991, au 46 de la rue Madame. Une “boutique-boudoir” à laquelle s'ajoute en 2000 une seconde adresse, cette fois boulevard Saint-Germain. « Pour attirer une clientèle plus internationale, à ce moment-là, la rue Madame était trop enclavée. » À présent, Antoine de Macedo a quitté le 46 rue Madame pour s'installer au 28 mais il a conservé la boutique de Saint-Germain.

Le marché de la montre de collection est tenu aujourd'hui plus par la spéculation que par la passion

« Je réserve Saint-Germain aux montres neuves, assez accessibles, moins de 5 000 euros, Tudor, Longines, Bell & Ross… Rue Madame c'est une autre histoire. Du neuf très haut de gamme, Laurent Ferrier, Breguet, Blancpain, Omega… et le top du vintage. Non seulement nous proposons un siècle de montres-bracelets, des années 20 à nos jours, mais nous sommes un des rares magasins où l'on peut acheter une Omega neuve ou une des années 40. » L'histoire d'Antoine de Macedo est une réussite qui s'explique par son honnêteté. Point barre.

À la campagne, Antoine porte une Seiko à quartz depuis qu'il a explosé une Patek Philippe en jardinant

C'est un horloger qui vend des montres. Pas un trader reconverti qui fait du business sur les montres. La nuance est d'importance. Sa réputation est “nickel”, il ne traîne pas de casseroles. Son mantra ? « Je déteste les problèmes , répond-il. La meilleure façon de ne pas en avoir c'est de ne pas en causer. » Il sait aussi s'adapter et s'entourer de bons collaborateurs. Son équipe qui compte une vingtaine de personnes est jeune : « Le secret de la longévité, c'est la jeunesse ». Il a aussi adopté de nouvelles façons de travailler avec notamment un site marchand up to date et une présence offensive sur Instagram… Mais, avant tout, il reste humain. Et entretient des relations intimes avec ses clients en leur offrant une expérience. Son secret ? Garder la tête froide par rapport à la spéculation grandissante : « Nous passons d'un marché de passionnés à un marché de financiers et nous nous retrouvons en face de mastodontes comme Chronext ou Thewatchbox avec des prix de certaines références exorbitants. Le marché mondial de la Patek Philippe Nautilus 5711 représente par exemple 2 milliards de dollars, on achète aujourd'hui des parts de 5711. Le passionné, de fait, est privé de montres au profit de brokers ». Le constat peut paraître effrayant mais, par définition, les tendances ne sont pas pérennes.

Ce qui conforte Antoine de Macedo dans sa façon d'avancer. Dernière surprise : il n'est pas collectionneur ! « Je porte la même montre pendant des années, en ce moment une Laurent Ferrier. Ensuite, je l'oublie et je passe à autre chose. À la campagne, je porte une Seiko à quartz des années 80 depuis que j'ai explosé une Patek Philippe en déracinant un cognassier… »

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