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Atelier Jalaper : Des chevaux sous le capot

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Atelier Jalaper : Des chevaux sous le capot
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Le cadran est le visage de la montre. Il en dit long sur son caractère. Pour leur première montre, Louis Jalaber et Simon Szleper entendaient laisser une empreinte, jouer sur la singularité, tracer leur voie.

En incorporant à ses montres un fragment de la DB5, Atelier Jalaper rend hommage à une GT de légende.

Elle serait mécanique, forcément. Déjà, durant leurs études, sur les bancs de l'ESCP, une prestigieuse école de commerce parisienne, les deux amis ne parlaient que de montres ou de voitures. Souvent de montres et de voitures. Par essence, automobile et horlogerie font bon ménage. Alors, forcément, leur montre se devait fusionner leurs deux territoires d'émotions. Mais, alors que tant de maisons ont partie liée avec le sujet, comment partir de la page blanche ? Une feuille d'aluminium deviendra le catalyseur. Un métal noble, léger, façonnable à l'infini.

Atelier Jalaper Photo
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Qui plus est, un métal griffé puisque les deux fondateurs d'Atelier Jalaper ont débusqué dans un petit garage en Angleterre un capot moteur d'Aston Martin DB5. Bingo ! « Quand on est passionné d'automobile, mais aussi de l'univers de James Bond, comme nous le sommes tous les deux, la DB5 c'est bien plus qu'une voiture de sport. C'est une légende, mais aussi une pièce de design et le reflet de l' élégance d'une époque. Trouver une pièce authentique, d' époque, a été une chance inespérée pour nous. C'est ce qui a complètement lancé notre projet de créer notre propre montre. D'autant plus qu'il est assez rare que les propriétaires changent cette partie-là de la voiture, même en cas d'accident, puisque l'aluminium peut être reformé et que les amateurs préfèrent souvent restaurer un véhicule avec ses pièces d'origine », admet volontiers Louis Jalaber.

Atelier Jalaper Photo
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Pour les deux créateurs, cette pièce de carrosserie recouvrant le moteur aura désormais une autre destination : devenir l'habillage du cadran de leur montre, surplombant naturellement un calibre mécanique. Encore fallait-il être capable de passer du projet à la réalité, de la planche à dessin à l'industrialisation. Une équipe se met en place. Inspiré, Constantin Sohier établit le principe graphique d'une fine plaque découpée et un effet nid d'abeille évoquant la grille de calandre de la GT anglaise, et dont il n'a été manufacturé que 1 059 exemplaires entre 1963 et 1965, en comptant les rares versions Vantage, les cabriolets et la douzaine de “Shooting brake”. Outre le design, à proprement parler, il faut aussi prendre en compte un certain nombre de paramètres, notamment l'optimisation de la précieuse tôle historique, acquise pour une somme rondelette et non négligeable au regard de la modeste trésorerie de l'entreprise naissante et lancée grâce à une souscription en ligne via Kickstarter. Pour la réalisation de leurs cadrans, les deux jeunes créateurs rencontrent Stéphane Muller, un spécialiste de la question. Un cadranier suisse, établi à la Chaux-de-Fonds. Tailler une fine portion dans le capot n'a pas été une mince affaire.

Une montre dessinée par le designer automobile Constantin Sohier

Non seulement parce que la plaque de métal n'était pas plane, mais avait bien entendu conservé la mise en forme accomplie à la main par les maîtres carrossiers, avec la prise d'air de refroidissement et les nervures, mais aussi parce que l'aluminium est un alliage très malléable.

La première opération nécessaire a donc été d'aplatir le capot. Puis vint le stade de la découpe, avec un calibrage au plus près pour tirer le plus grand nombre de pièces possibles. Comme dans Goldfinger, le film des aventures de 007 dans lequel apparaît la DB5 et forge une partie de son aura, c'est à un laser qu'est donnée la mission de trancher la matière. Résultat : 600 petits disques naissent à partir de la plaque d'aluminium. Tous identiques, grâce à la précision du rayon, mais chacun unique, en raison de l'histoire de l'aluminium.

De cette expérience, les deux fondateurs de l'Atelier Jalaper tirent désormais une compétence et élargissent le champ de leurs ambitions et rêvent déjà à d'autres séries de montres dont les cadrans pourraient être taillés dans des fragments de carrosseries de Lamborghini Miura, d'AC Cobra, de certaines Ferrari. Le rêve serait une Jaguar Type E avec son capot interminable… Pour l'heure, le pari est tenu avec le capot de la DB5 et les cadrans finis avec dextérité n'ont plus qu'à prendre place dans le boîtier de 40,5 mm de diamètre en acier inoxydable 316L, décliné en deux versions : métal brossé ou PVD noir. Reste une question que se poseront immanquablement les amateurs d'horlogerie : qu'a-t-elle sous le capot, cette montre au cadran d'Aston Martin ? Les deux associés se sont montrés intransigeants sur deux principes : avoir un mouvement mécanique mais garder un prix de vente raisonnable. En toute logique, ils se sont tournés vers le calibre à remontage automatique Miyota 821A. Un moteur dont la grande diffusion est un signe de la fiabilité. En jargon horloger, cela s'appelle un “tracteur”. Mais, après-tout, n'était-ce pas l'autre métier de David Brown, le patron d'Aston Martin à l'époque de la DB5 ?

GG

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